Cendrillon

« On a fait de son mieux pour vous faire envoler par les beaux pays bleus », telle est la promesse des auteurs alors que la salle Favart renaît de ses cendres. L’occasion est idéale pour représenter ce conte de fées, où une bonne marraine organise la venue au bal de Cendrillon qui rencontre son Prince charmant et le quitte aux douze coups de minuit. Du conte de Perrault, Cain conserve chaque épisode et ajoute le tableau du Chêne des Fées qui constitue d’ailleurs le clou du spectacle. Le livret est traité avec poésie et simplicité, respectant le conte tout en transformant le sadisme originel en comique de situation. À cet humour, apanage de la marâtre et ses filles, s’ajoute la bonhommie mélancolique de Pandolfe, le beau sentiment du couple Cendrillon-Prince et l’univers fantastique des Fées. La partition s’en trouve riche, l’écriture musicale noble et chatoyante, l’orchestration lumineuse et l’écriture vocale particulièrement exigeante, notamment pour la Fée et son propre langage de broderies, trilles et vocalises. Achevée l’été 1895, Cendrillon cède l’affiche à Sapho, tandis qu’à l’Opéra-Comique on souhaite rendre un ultime hommage à Daudet. La féérie n’est créée que plus tard mais dans un contexte idéal, tandis qu’Albert Carré, nommé directeur, souhaite révéler toute la modernité de la nouvelle salle Favart. Julia Guiraudon, future épouse du librettiste, triomphe dans le rôle-titre aux cotés de Blanche Deschamps-Jehin (la Haltière), Lucien Fugère (Pandolfe) et Georgette Bréjean-Gravière (la Fée). Jamais une œuvre musicale n’avait autant fait corps avec sa mise en scène, au point que s’y confondent la Fée marraine et la nouvelle Fée des théâtres : l’électricité.