Le Prophète

Après les deux succès retentissants de Robert le Diable et des Huguenots, le duo Scribe et Meyerbeer conquiert à nouveau le public de l’Opéra de Paris en faisant représenter Le Prophète le 16 avril 1849. Inspirée du soulèvement des anabaptistes au XVI^e siècle, l’intrigue imaginée par Scribe trouve dans le contexte agité des révolutions et des troubles religieux du temps un singulier écho dont témoigne l’éclosion de nombreuses discussions au sujet de l’opéra dans la presse. L’efficacité dramatique de l’ouvrage est par ailleurs saluée par la critique qui voit notamment dans la scène de la reconnaissance (acte IV) un sommet dans l’œuvre du librettiste. Le succès de l’opéra tient aussi à la qualité de la distribution qui imprimera durablement sa marque sur les rôles-titres tenus par la mythique Pauline Viardot (Fidès) et par le célèbre ténor Gustave Roger (Jean). À l’instar des opéras à succès du temps, Le Prophète suscite un grand nombre de transcriptions et de parodies aux titres parfois savoureux (L’Âne à Baptiste, par exemple). Comme dans Les Huguenots, où le choral Ein feste Burg tient lieu de leitmotiv, l’ouvrage est ponctué par les retours du chœur Ad nos ad salutarem undam. La partition est aussi caractérisée par une pompe exceptionnelle. La scène du couronnement superpose en particulier à l’orchestre plusieurs chœurs placés sur la scène et en coulisse, une fanfare de saxhorns et un orgue. Cette puissance sonore se combine à une très grande richesse chorégraphique (ballet des patineurs) et au luxe incomparable des costumes et des décors, illuminés pour la première fois à l’Opéra par la lumière électrique.