Les Vêpres siciliennes

Après avoir remanié I Lombardi pour l’Opéra de Paris (rifacimento de 1847 titré Jérusalem), Verdi accepta le défi d’une partition composée spécialement pour la « grande boutique » et directement en français. Scribe et Duveyrier lui fournirent un livret inspiré par l’insurrection des Siciliens contre le pouvoir de Charles d’Anjou en 1282, Scribe reprenant ici des extraits du Duc d’Albe qu’il avait écrit en 1839 pour Donizetti (lequel laissa son opéra inachevé). La création des Vêpres siciliennes le 13 juin 1855, pendant l’Exposition universelle, fut applaudie du public et des critiques, dont Berlioz qui loua « l’intensité pénétrante de l’expression mélodique, la variété somptueuse, la sobriété savante de l’instrumentation, l’ampleur, la poétique sonorité des morceaux d’ensemble, le chaud coloris qu’on voit partout briller, et cette force passionnée mais lente à se déployer, qui forme l’un des traits caractéristiques du génie de Verdi ». Stimulé par l’idée de se mesurer à Meyerbeer sur le terrain du grand opéra, le compositeur italien souscrivit aux conventions du genre : intrigue historique en cinq actes opposant des destins individuels à l’histoire collective, chant amplement déclamé ou émaillé de vocalises virtuoses (Boléro d’Hélène « Merci, jeunes amies » à l’acte V), grand spectacle comportant un ballet, des ensembles et des chœurs (notamment lors des vastes tableaux à la fin des actes II et III). Verdi sut tirer parti du cahier des charges pour explorer de nouvelles voies, tremplin qui conduisit à Don Carlos douze ans plus tard.