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Premières représentations / La Soirée. Namouna

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PREMIÈRES REPRÉSENTATIONS
Académie nationale de musique. — Namouna, ballet en deux actes et trois tableaux, de MM. Nuitter et Petipa, musique de M. Lalo.

Le scénario du nouveau ballet est connu par les indiscrétions des journaux ; les réclames préalables ont déjà célébré les merveilles de décors et de mise en scène. Il ne me reste donc plus qu’à vous parler de la musique, et cela m’est difficile, car, selon sa louable habitude, la majestueuse direction de l’Opéra ne veut pas déflorer les œuvres si laborieusement enfantées en invitant la critique à une répétition générale.

Qui souffre de cet état de choses ? C’est toujours l’auteur, dont l’œuvre est forcément jugée la plupart du temps avec trop de précipitation et point suffisamment entendue. Sera-t-on mieux avisé pour Françoise de Rimini ? M. Lalo est un musicien remarquable, appartenant au groupe des compositeurs qui ont révélé au public les nouvelles aspirations de l’école française. Comme valeur musicale, son nom est classé non seulement en France, mais à l’étranger ; il connaît à fond le maniement de l’orchestre, et son style est très épuré.

La musique de Namouna se ressent de ces grandes qualités, mais c’est tout ce que l’on veut, excepté de la musique de ballet. Les maîtres du genre, MM. Adolphe Adam, Schneitzhœffer, Léo Delibes, Minkous, etc., avaient recours, pour les besoins de la musique de ballet, aux phrases carrées et mélodiques, tandis que les musiciens d’aujourd’hui semblent avoir horreur de la clarté et de la forme. Eh bien ! ces précieuses qualités sont surtout exigibles dans la musique de ballet, où la mélodie doit entrer dans l’oreille de l’auditeur sans qu’il s’en aperçoive ; car le spectacle des yeux l’emportera toujours sur l’organe auditif.

Bien peu de personnes s’isoleront assez pour s’intéresser aux détails du travail orchestral, traité au point de vue symphonique. Ceux qui ont eu la malencontreuse idée de massacrer la partition de Don Juan, en y introduisant un ballet pour allonger le spectacle et contenter les abonnés de l’Opéra, ont eu néanmoins l’intelligence de prendre dans le domaine symphonique de Mozart ce qui s’y trouve de plus clair et de plus rythmé.

Ceci dit, je rends néanmoins justice au talent qu’a déployé M. Lalo dans Namouna, où ses qualités de musicien élevé, toujours distinguées et intéressantes, sautent aux yeux de quiconque s’est occupé un peu de musique.

En ouvrant toutes grandes les portes de l’Opéra à M. Lalo, M. Vaucorbeil devait lui donner des chœurs, des solistes chanteurs, et non de la lumière électrique, des décors et des jambes.

Mlle Sangalli a employé toutes les séductions, tous les charmes, tous les secrets de l’art chorégraphique qu’elle possède à un degré si supérieur.

Je note au fur et à mesure les principaux pas de la diva. Dans le premier acte, celui de la Bouquetière, dansé, entre les deux épées de MM. Mérante et Pluque ; dans ce pas d’action, Namouna a déployé beaucoup de grâce, de coquetterie et d’espièglerie.

Puis, le fameux pas de la Charmeuse, dans lequel on a supprimé la cigarette devant être fumée par la Sangalli, et, pour clore, dans le premier acte, la danse de la Roumaine, où se trouvent réunies la morbidezza et la hardiesse.

Au deuxième acte, je remarque l’andante entre Mérante et Sangalli, avec ses difficultés de pointes si sûrement faites ; puis la variation capitale, qui est tout à fait de la haute école.

Je m’arrête ici pour féliciter en passant M. Taffanel, l’éminent flûtiste, pour la manière dont il a joué ses traits difficiles, écrits un peu bas pour l’instrument.

Il n’est pas mal, de temps à autre, que le public sache quels artistes éminents possède l’orchestre de l’Opéra et avec quel avantage ils pourraient damer le pion aux plus grands chanteurs. Quand j’aurai cité encore la coda dans l’Orgie, Danse noble, la scène de pantomime dramatique où Namouna supplie pour sauver son amoureux, j’aurai rendu exactement mes comptes.

Mlle Sangalli, l’étoile à laquelle on doit les créations de Sylvia, Yedda, la Source, brille toujours du plus vif éclat.

Mlle Subra s’est fait applaudir dans les variations au lever de rideau du deuxième acte, et qu’elle danse très bien. C’est, du reste, l’une des plus jolies choses du ballet, et des mieux réussies au point de vue chorégraphique.

Quelques points noirs à noter : le pas du Duel finit mal ; il gâte l’action. L’orchestre Sax, sur la scène, est inutile et hors d’à-propos. Pour ce qui concerne les défauts de la partition, trop de piano et de pianissimo dans l’orchestre. M. Lalo a eu tort également de négliger partout la cadence finale, absolument nécessaire pour l’effet de la danse.

Je reviens à mes moutons. Il est regrettable que M. Lalo, obligé d’écrire un ballet, n’ait pas suivi la route tracée par les maîtres du genre que j’ai déjà mentionnés.

L’expérience et le talent du maître de ballet, M. Petipa, et les costumes dessinés si artistiquement par M. Lacoste, ainsi que les beaux décors, font du ballet de Namouna un charmant spectacle pour les yeux et l’oreille. On peut dire de ce ballet, en écoutant l’orchestre : C’est un concert mimé dont la couleur générale est tant soit peu mélancolique.

D. Magnus.

LA SOIRÉE
NAMOUNA

On a pu croire un instant qu’en sa qualité d’archiviste de l’Opéra, M. Nuitter serait obligé de laisser sa Namouna aux archives. Quelles ont été les vraies causes du retard ? Paris se le demande depuis un mois avec anxiété, sans qu’on ait jeté à son avide curiosité autre chose qu’un vulgaire mal au pied. Ge n’est pas un coup de pied, c’est simplement le coup du pied.

Loin de moi la pensée de contester que la fée des airs nommée Rita Sangalli ait eu à se plaindre de son orteil gauche ; il ne suffit point d’avoir le bras et le jarret puissants pour que la cheville ne faiblisse jamais. Il y a donc eu mal au pied. Cependant des gens qui se prétendent bien informés insinuaient encore hier que les ballerines ont parfois l’amour-propre aussi sensible, sinon plus, que le tarse et le métatarse : était-ce une allusion ? je n’oserais l’affirmer.

Après tout, pour, être danseuse on n’en est pas moins femme. Mais la nature du sujet m’oblige à glisser sans appuyer. La légèreté est ici de commande.

Donc, hier soir, on a enfin joué Namouna et, sa blessure se trouvant bien guérie, Mlle Sangalli a remporté un triomphe de plus. Résultat prévu pour ses admirateurs, c’est-à-dire pour tout le monde.

C’est à Corfou, en plein dix-septième siècle, que se passe l’action de Namouna. Le ballet, de ballet de MM. Nuitter, Petipa et Lalo n’a (on l’a déjà dit aux lecteurs de Gil Blas) rien de commun avec la célèbre fantaisie Musset.

Des deux tableaux du premier acte, l’un représente un Khani ; le second, une place publique.

Le deuxième acte se passe dans une île de l’Archipel.

Savez-vous, ce que c’est qu’un Khani ?... C’est tout simplement un tripot… au pays des Grecs – sans jouer sur les mots. La couleur locale a été admirablement respectée, — je ne parle pas des grecs.

C’est là qu’une sorte de don Juan, nommé Ottavio, gagne à une bonne pâte de pirate, qui répond au doux nom d’Adriani, sa fortune tout entière, ni plus ni moins que Bertram à Robert-le-Diable. La scène se danse, au lieu de se chanter ; mais on comprend tout de même l’analogie.

En véritable gentilhomme, don Ottavio se soucie peu des richesses. Parmi les trésors qu’il a gagnés, se trouve Namouna l’esclave, qu’on lui amène voilée. Ayant d’autres amours en tête, il ne daigne même pas la regarder ; alors que Namouna aurait préféré un sourire du beau viveur, Ottavio se consente de lui faire présent de ses « petits bénéfices », générosité qui transforme Namouna en sa propre propriétaire. Quelle veine !... N’était la tristesse de se voir méprisée par un beau garçon – M. Mérante ! – qu’elle ne connaît pas, Mlle Sangalli s’en soulèverait jusqu’aux frises.

Elle préfère suivre « celui qu’elle aime » sur la place où le séducteur donne une sérénade à sa redoutable rivale, la toute charmante Mlle Invernizzi. Malgré sa prestesse, Namouna a été devancée par le farouche pirate Adriani, M. Pluque. Sans une ravissante bouquetière, qui fait là fort agréablement l’office de messieurs les gendarmes, le sang aurait même probablement coulé. Pas de la bouquetière. – Vous voyez qu’on commence par le bouquet – car cette bouquetière, vous l’avez deviné, n’est autre que Mlle Sangalli.

Suivent la fête des Palmes et le divertissement des Ioniennes.

Le pas idéal de la charmeuse (Mlle Sangalli) arrive à propos pour empêcher Ottavio de se laisser charmer par son ancienne.

Entre temps, un joueur de mandore (M. Vasquez) exécute des sauts prodigieux.

Cependant la douceur n’étant pas suffisante, Namouna fait enlever Ottavio par une troupe d’honnêtes gens qui lui sont dévoués. Pas de la Roumaine, par Mlle Sangalli, qui surveille l’enlèvement.

Les gens dévoués ont transporté l’heureux Ottavio dans une île de l’Archipel ; c’est vous dire que nous sommes au second acte. Sieste des esclaves, ballet des fleurs. Namouna ayant enfin pu se faire reconnaître, le jeune seigneur avoue facilement qu’il ne peut être ingrat envers une jeune personne aussi éprise. Mais il n’est pas au bout de ses peines.

Les forbans d’Adriani surviennent (valse)… Heureusement, les amis de Namouna font boire les pirates (orgie). Mlle Sangalli danse le Pas de la Coupe. Ottavio serait sauvé, si Adriani ne se précipitait pour se venger lui-même. Le jeune lotis se trouve là fort à propos pour s’interposer et poignarder « le traître ».

Telles sont, en abrégé, les paroles du livret mis en pirouettes par M. Petipa et en musique par M. Lalo. L’ouvrage a été joué, malgré les temporisations, tel que le musicien l’avait écrit. M. Lalo a refusé de faire aucun changement, aux répétitions, pour faciliter les combinaisons chorégraphiques.

— C’est déjà bien assez, disait-il, d’avoir consenti à rythmer de la musiquette de danse, sans la déchiqueter encore au gré de messieurs les sautants et de mesdames les tournantes.

M. Lalo a failli ne pas voir sa première ; peu s’en est fallu qu’il ne pût terminer sa pièce. Une paralysie du bras droit et de la langue était la coupable de ce contre-temps.

Un moment, M. Vaucorbeil demanda à M. Widor s’il consentirait à faire les morceaux inachevés.

Heureusement l’état de M. Lalo s’améliora avec rapidité et lui permit de se passer d’aucun secours.

Une des grandes discussions qui apportèrent des retards fut la question de savoir si, au pas de la Charmeuse, Mlle Sangalli fumerait une cigarette ou ne la fumerait pas.

— Fumera ! fumera pas ! fut une grave controverse.

Après plusieurs suppressions et réintégrations, M. Vaucorbeil fit prévaloir l’avis des pompiers et, de crainte du feu, supprima la cigarette. Mlle Sangalli n’a pas besoin de cet accessoire pour charmer, non-seulement don Ottavio, mais le public tout entier.

La mise en scène, comme toujours à l’Opéra, est splendide.

Rien d’extraordinaire à la salle de jeu du prologue.

Mais le second tableau, de MM. Rubé et Chaperon et le troisième, de M. Lavastre, sont tout à fait remarquables.

La place publique de Corfou nous montre à droite un magnifique palais grec ; à gauche, une estrade en bois adossée à une maison ; au fond, la mer.

L’île est le voisinage d’un pavillon à la turque, sur la plage bordée de montagnes. Les hauts platanes du premier plan laissent découvrir au loin les flots bleus, couronnés de cimes qui dentellent l’horizon en larges découpures. On dirait d’un lac suisse encadré par des arbres. L’effet est saisissant.

Bien que les vêtements des danseuses se ressemblent toujours un peu, les tuniques grecques avec le veston, la calotte ou le bandeau, les molletières de couleur et la bande qui borde les jupes, donnent un cachet original aux costumes de Namouna. Faut-il le dire ? ceux des hommes, notamment celui de M. Mérante, ont plus d’exactitude que ceux des femmes. Il est vrai qu’ils ont moins besoin d’être écourtés.

Les pas les plus applaudis ont été celui de la Bouquetière, celui de la Charmeuse et celui de la Coupe, par Mlle Sangalli. L’éminente ballerine s’est véritablement surpassée en grâce et en légèreté. Ce n’est plus de la danse, c’est de la voltige aérienne.

Après Mlle Sangalli, il faut citer en première ligne la gracieuse Mlle Subra, qui, dans la sieste des esclaves, a fait preuve d’une souplesse et d’une désinvolture des plus rares.

Ensuite… ma foi, ensuite… MM. Mérante, Pluque, Cornet sont des danseurs émérites ; Mlles Biot, Invernizzi, Mercédès, Adriana et autres, sont de charmantes personnes, battant à merveille les entrechats et les jetés-battus. Mais… vous dire qu’elles ont empêché les bâillements d’une bonne partie de la salle, ce serait peut-être exagérer l’optimisme.

Quelques malveillants ont protesté à la fin contre les applaudissements. C’était évidemment des gens qui n’avaient pas suffisamment compris la partition.

Mot cueilli à la sortie :

— Pour qui cette avalanche de bouquets de roses, sous laquelle disparaissent les danseuses ?

— Ne voyez-vous donc pas que c’est une délicate attention à l’adresse de ce pauvre M. Périvier ?

Eugène Hubert.

Persone correlate

Compositore

Désiré MAGNUS

(18.. - 1883)

Compositore

Édouard LALO

(1823 - 1892)

Opere correlate

Namouna

Édouard LALO

/

Charles NUITTER

Permalink

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data di pubblicazione : 31/10/23