Répétition générale. Namouna

Répétition générale

Dédaigné voici vingt-six ans, le ballet d’Edouard Lalo, NAMOUNA, connaît aujourd’hui, à l’Opéra, une gloire tardive qui sera durable.

C’est une belle histoire extravagante, telle qu’il la faut pour un ballet. Invraisemblables à souhait, les aventures de Namouna, la belle esclave, généreusement rendue à la liberté par don Ottavio, qui la gagna aux dés au pirate Adriani, son maître. Invraisemblables, soit mais compréhensibles toujours. Et ce spectacle, qui se soucie peu d’être raisonnable, peut ainsi se goûter sans fatigue.

Il suffit donc qu’il soit magnifique et pittoresque. Il l’est et fait le plus grand honneur à la direction nouvelle. La mise en scène est ingénieuse, assez neuve pour éviter jusqu’au bout ce qu’il y a d’un peu ridicule dans les rites traditionnels du ballet. Les costumes, fort riches, sont d’un excellent goût, et ce sont de séduisantes harmonies de couleurs que les grands ensembles ; la fête populaire du premier acte, à Corfou, si vive, si animée, si grouillante en un admirable décor. Ou mieux encore l’original divertissement chez Ali, le marchand d’esclaves. Un esprit nouveau, décidément, souffle à l’Opéra.

Les gens de bon sens, en 1882, s’accordèrent à trouver la musique de Lalo wagnérienne, obscure et peu mélodique. Sans doute, s’ils ne sont point tous morts, les critiques de ce temps feront-ils demain amende honorable. Obscure et peu mélodique, cette partition ruisselante de clarté et de couleur, au rythme nerveux, où surabondent les thèmes les plus expressifs et les plus séduisants, mis en œuvre avec l’art le plus sobre et le plus raffiné ! Le goût musical a vraiment évolué depuis vingt-cinq ans.

L’exécution orchestrale, dirigée par M. Paul Vidal, fut intelligente et chaleureuse. Et Mlle Zambelli, dans un ensemble chorégraphique d’élite, s’affirma, une fois de plus, la ballerine idéale.