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Cinq-Mars de Gounod

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Opéra-Comique. — Cinq-Mars, opéra-comique dramatique en quatre actes et cinq tableaux, paroles de MM. Poirson et Gallet, musique de M. Gounod.

L'œuvre a fait mardi son apparition sur l'affiche, et jeudi elle a été représentée. Il faut croire que M. Carvalho a changé de sentiment sur le meilleur système à employer pour allécher le public : jadis, le célèbre impresario annonçait un opéra nouveau trois ou quatre semaines à l'avance ; cette fois, il n'y a eu qu'un retard de trois quarts d'heure ; ce n'est vraiment pas la peine d'en parler.

Cinq-Mars, nous le constatons joyeusement, a obtenu jeudi un énorme succès à l'Opéra‑Comique. Une salle magnifique a applaudi l'œuvre d'un bout à l'autre avec une énergie remarquable et a fait bisser plusieurs morceaux. On a même demandé l'auteur à la fin, mais M. Gounod « venait de quitter le théâtre » : c'est l'expression consacrée.

Nous avons déjà lu hier, dans quelques journaux, qu'il n'était pas possible, après une seule audition, de rendre compte d'un ouvrage comme Cinq-Mars. Pourquoi écrire cela ? M. Gounod a voulu, cette fois, être simplement mélodique, scénique et concis ; il a parfaitement atteint son but : il n'y a rien dans Cinq-Mars qui exige des efforts d'attention de la part de l'auditeur. Depuis l'introduction jusqu'au cantique final, toutes les pages de l'œuvre se font remarquer par une excessive clarté, et celles qui portent l'empreinte personnelle du maître y sont aisément reconnaissables à première audition. Aussi le public ami, qui garnissait la salle, n'a pas eu la moindre hésitation quand il s'est agi d'applaudir.

M. Gounod a écrit en quelques semaines son Cinq-Mars. Peut-être a-t-il eu tort ; mais comme nous sommes ici pour rendre compte d'un succès éclatant de première, nous n'avons pas à voir au‑delà du résultat.

Nous le répétons : tous les morceaux ou presque tous ont été frénétiquement applaudis. On a bissé, au second acte, la chanson caractéristique, fort spirituellement chantée par Barré. Au troisième, bis du grand chœur des conspirateurs, page imposante par son éclat et sa franchise. Au quatrième tableau, bis d'un trio plein de passion et d'un joli chœur de chasseurs. On aurait voulu faire bisser aussi le trio passionné du dernier acte, qui contient un allegro d'une grande originalité et qui nous a sincèrement empoigné. Enfin, l'opéra, applaudi d'un bout à l'autre, s'est terminé par une splendide ovation.

La pièce de MM. Poirson et Gallet n'a pas gêné le musicien. C'est un drame qu'on dirait taillé à coups de hache : les bonnes scènes y sont nombreuses. C'est du drame avec tous les accessoires d'usage. On coupe deux têtes à la fin, ce qui n'a rien d'extraordinaire à l'Opéra-Comique. Nous aurons peut-être à rechercher plus tard si ce théâtre doit logiquement faire concurrence à l'Opéra et au Lyrique ; mais l'œuvre très-applaudie de Gounod n'ayant rien à voir dans cela, contentons‑nous de proclamer le succès de jeudi.

Pour être strictement juste, il faut attribuer une bonne part de ce succès à Dereims. Comme il s'est vite formé, le jeune artiste qui débutait, il y a quatre ans à peine, sur la petite scène de l'Athénée ! Comme il chante et comme il joue aujourd'hui ! Quelle chaleur d'expression, quelle naturel, disons le mot : quelle puissance d'effet ! Dereims nous a fait le plus grand plaisir, comme chant et comme jeu. Sa voix puissante, surtout dans le médium, a des demi-teintes d'une tendresse idéale. Le public a applaudi et rappelé plusieurs fois le jeune artiste ; ce début est certainement l'un des plus beaux que nous ayons vus depuis longtemps. Dereims nous a rappelé, comme précision, comme élégance scéniques et comme effet vocal, Monjauze dans son beau temps ; nous dirons même qu'il chante mieux que ne chantait alors Monjauze. On voit que Dereims a interprété le répertoire italien devant des publics difficiles à satisfaire. Son talent est un intéressant mélange de méthode italienne et de méthode française. Grand, très-grand succès pour le débutant.

Mlle Chevrier, dans l'étrange rôle de Marie de Gonzague, a été accueillie sympathiquement. Belle voix dont le travail fera certainement quelque chose. M. Stéphanne a chanté de Thou avec beaucoup de talent. Barré est charmant. Giraudet joue en excellent comédien le terrible père Joseph, qui n'est pas la plus grande joie de l'opéra comique représenté samedi. Giraudet a eu le tact de ne pas jouer en troisième rôle ce sombre coupeur de têtes : la note était discrètement donnée. Éloges à Giraudet, chanteur et comédien. Il a su faire passer son sanglant monologue sur le tontaine, tonton des cors ; c'est très-méritoire, cela.

Mme Franck-Duvernoy s'est fait beaucoup applaudir. Mlle Marie Périer, à qui la partition ne fournissait pas une occasion de succès s'est vengée en se montrant femme charmante et gracieuse comédienne. Le ballet a valu un succès mérité à Mlle Laurençon, bien secondée par de gentilles ballerines.

Mise en scène éblouissante et élégante. M. Carvalho n'avait jamais fait mieux. Le tableau de la fête chez Marion Delorme est un chef-d’œuvre qui tenterait le plus difficile des peintres. L'orchestre, augmenté, et les chœurs, ont fait des prodiges de vigueur. À chaque nouvelle reprise, nous remarquons que cette vigueur s'accentue davantage ; si la progression ne s'arrête, il est certain que l'Opéra-Comique, jadis doux et gracieux, deviendra le théâtre le plus énergique de Paris. On y pourra reprendre la Vestale ou le Prophète, ce qui sera une grande joie pour M. Koning, directeur de la Renaissance.

CLARIS.

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Cinq-Mars

Charles GOUNOD

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Paul POIRSON Louis GALLET

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data di pubblicazione : 18/09/23