La musique adoucit les mœurs

LA MUSIQUE ADOUCIT LES MŒURS

Un petit incident s’est produit hier, à la sortie de l’Opéra-Comique. 

M. le général Boulanger, qui assistait à la première représentation du Roi d’Ys, paraissait un peu chagriné de voir que personne ne semblait le connaître dans la salle. 

À la sortie, le fidèle Paul Déroulède, mis au courant de l’indifférence sceptique des Parisiens de race, improvisa une petite ovation. 

M. Paul Déroulède, l’œillet rouge à la boutonnière, entouré de quelques amis qui portaient le même signe de ralliement, poussa un vivat lorsque le général, caressant sa barbe blonde, de l’air ennuyé qu’il sait prendre lorsque tout ne marche pas à son désir, parut sous le péristyle. 

Les coryphées donnèrent mollement.

Des « chut ! » discrets partirent de la fouie des spectateurs. 

L’incident fut vite clos.

Ainsi il s’est produit des « chut » après la représentation du Roi d’Ys, bien que cette pièce ait obtenu un succès des plus retentissants. 

— Le Roi d’Ys, murmurait M. le général Boulanger, pourquoi ne pas le nommer, puisqu’il s’appelle Charles… Charles d’Ys… Un personnage a déjà régné sous ce nom. Tandis que personne ne s’est encore appelé Ernest Premier ! 

Ce minuscule point d’histoire contemporaine nous a paru mériter l’honneur de passer à la postérité. 

Nous n’insisterons pas au sujet de l’esthétique chère à M. le général Boulanger ; mais nous croyons qu’il préfère Desormes et Antonin Louis, les auteurs d’En revenant de la revue et des Pioupious d'Auvergne, à M. Ed. Lalo.