Roma de Massenet
Théâtre de Montecarlo
« ROMA »
Opéra tragique en 5 actes, poème de M. Henri Cain, d’après « Rome vaincue », d’Alexandre Parodi, musique de J. Massenet (création).
Carthage a vaincu Itome. Annibal qui vient d’infliger plusieurs défaites aux légions romaines, marche sur la ville. Le peuple est affolé, le Sénat consterné. Le sénateur Fabius Maximus s’efforce de relever le moral de ses concitoyens et les exhorte à s’armer pour défendre Rome. Lentulus, jeune tribun légionnaire, échappé au désastre de l’armée romaine, fait le récit de la défaite et raconte la mort du consul Paul Émile. Le grand-prêtre Lucius Cornélius qui vient de consulter les oracles, annonce qu’un sacrilège a provoqué la colère des dieux. Une vestale a enfreint ses vœux.
Dans le temple de Vesta, Lucius et Fabius interrogent les vestales. Une d’elles, Junia, s’accuse d’une faute imaginaire, mais Fausta, nièce de Fabius, petite-fille de l’aveugle Posthumia, que son amour pour Lentulus a rendue coupable, se trahit elle-même en perdant connaissance lorsque le grand-prêtre annonce faussement que le jeune légionnaire a trouvé la mort sur-le-champ de bataille. Lucius offre à Fabius de sauver la coupable ; mais, stoïque, le sénateur romain lui ordonne de faire son devoir.
Vestapor, esclave gaulois, gardien du temple de Vesta, qui hait les Romains, veut sauver Fausta. Restant, impuni, le sacrilège de la vestale entraînera l’écrasement complet de Rome. II fait évader Fausta et Lentulus par un souterrain dont il jette la clef dans un puits. Le grand-prêtre qui survient, fait saisir Vestapor qui est livré aux tortionnaires.
Les sénateurs sont réunis dans leur salle des séances. Lucius préside. Fausta que les remords ont poussée à se livrer elle-même, vient se jeter dans les bras de Fabius, qui lui reproche son crime. Apparaît Posthumia, conduite par son esclave Galla. L’aïeule emploie tour à tour les supplications et les menaces pour obtenir la grâce de la jeune fille. Les sénateurs sont inflexibles. Fausta, recouverte du voile noir d’infamie, est condamnée à être enfermée vivante dans un caveau. Fabius, voulant éviter à sa nièce le supplice atroce qui l’attend, charge Posthumia de remettre à Fausta un poignard qui lui donnera une mort moins cruelle.
La vestale est amenée devant son tombeau. Posthumia demande à embrasser une dernière fois sa fille. Elle veut lui remettre le poignard, mais les mains de Fausta sont liées. Alors, encouragée par la jeune fille, l’aïeule cherche la place du cœur et la frappe. Le corps de Fausta est descendu dans son tombeau. Vesta est satisfaite. Rome, est sauvée et Scipion qui a battu Annibal, rentre en triomphateur.
Le livret de M. Cain, que nous venons de résumer, respecte l’œuvre d’Alexandre Parodi et en conserve toute la force dramatique sous une belle forme littéraire. Quant a la partition de M. Massenet, on peut affirmer qu’elle se placera parmi les meilleures de l’illustre maître. La paissance musicale de l’œuvre se manifeste dès le début, dans l’ouverture symphonique qui en expose le caractère tragique. Le premier acte, très mouvementé, exposant l’affolement du peuple romain vaincu, est, en grande partie occupé par les chœurs ; les apostrophes de Fabius à la foule, le récit émouvant de Lentulus, racontant la mort de Paul Emile, l’entrée de Posthumia, se, détachent en lumière. L’accueil est déjà très chaleureux. Au deuxième acte, l’air de la vestale Junia, délicieusement chanté par Mme Guiraudon, est longuement applaudi par le public qui voudrait le faire bisser.
Le troisième acte, traité dans la forme « opéra », enthousiasme la salle. Les phrases véhémentes de Vestapor, dont M. Noté rend admirablement le caractère farouche, l’air de Lentulus, « Soir admirable, je te salue », le duo qui suit avec Fausta et se termine en trio avec Vestapor soulèvent de longues acclamations. Après cet acte, les spectateurs se tournent vers la loge princière appelant l’auteur qui ne se montre pas.
Au quatrième acte, l’œuvre atteint une intensité tragique impressionnante. Le duo entre Fabius et Fausta, les supplications et les imprécations de Posthumia qui veut arracher sa fille à la mort, sont des pages dont l’effet est saisissant.
Un entr’acte vocal, coupé d’appels de trompettes, précède le cinquième acte, dont l’effet grandiose achève de transporter le public qui ne cesse d’applaudir. Le maître Massenet paraît au bord de la loge à côté du prince. C’est alors une ovation formidable. Toute la salle est debout. De partout, des bravos frénétiques moment vers le maître.
L’interprétation de Roma est admirable. La beauté et l’étendue de l’organe de la voix de Mlle Kousnezoff, ainsi que son talent dramatique ; le charme de la voix si pure, si cristalline de Mme Guiraudon ; la puissance tragique de Mlle Lucy Arbell ; la fougue et la vaillance de M. Muratore ; l’autorité magistrale de M. Delmas et sa parfaite diction ; l’organe vibrant et sonore de M. Noté ; la correction de M. Clauzure et l’ampleur de sa voix ont assuré le triomphe de la belle œuvre dont la création leur était confiée.
Les chœurs précis dans la force comme dans la douceur ont fait honneur à leur chef, M. Louis Vialet, et l’orchestre fut ce qu’il est toujours, sous la direction de M. Léon Jehin, c’est-à-dire incomparable.
Nous ne trouvons plus d’éloges pour M. Visconti : qu’il nous suffise de signaler que, au lever du rideau au 3e acte, des applaudissements nourris saluèrent son beau décor du bois sacré autour du temple de Vesta.
LL. AA. SS. le prince Albert et le prince héréditaire assistaient à cette magnifique soirée, donnée à l’occasion de la fête française. Avaient été invités à prendre place dans leur loge : M. Vianès, consul général de France, et Mme Vianès ; M. le préfet des Alpes-Maritimes, Mme et Mlle de Joly. Dans les autres loges, on remarquait les généraux Hélouis et Colle, venus de Nice ; l’amiral Moreau de l’escadre de la Méditerranée ; le sous-préfet de San-Remo et des officiers de bersaglieri italiens.
Nolim.
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Jules MASSENET
/Henri CAIN
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data di pubblicazione : 18/09/23