Ascanio

« Cherchez Saint-Saëns », titre la presse au printemps 1890 alors qu’Ascanio est présenté pour la première fois au public, le 21 mars, à l’Académie nationale de musique. C’est que le musicien ne s’est présenté ni aux répétitions ni à la première, et les rumeurs vont bon train. En vérité, Saint-Saëns se remet difficilement de la disparition de sa mère et choisit de retarder son retour à Paris. Il laisse néanmoins des recommandations très précises pour la mise en œuvre de son opéra et réclame que son ouvrage soit « exécuté tel qu’il est, sans aucun changement d’aucune sorte ». Son vœu ne sera pas exaucé : à la première et lors des représentations ultérieures, de nombreuses coupures sont opérées dans la partition et des modifications apportées à la distribution, de telle sorte que Saint-Saëns n’entendra jamais Ascanio comme il l’a composé. Ce n’est qu’en novembre 2017 qu’est donnée à l’Opéra des Nations à Genève une version intégrale conforme à l’autographe du musicien. La partition se caractérise par la présence de motifs conducteurs qui évoquent les principaux personnages de l’intrigue et assurent fluidité et cohérence à l’œuvre. Fidèle à sa passion pour le drame historique, Saint-Saëns la colore également d’échos à la musique de la Renaissance (notamment dans le ballet), fantasmant néanmoins le paysage sonore d’un drame situé à la cour du Roi de France en 1539. Benvenuto Cellini (baryton) y séjourne avec son apprenti, Ascanio (ténor) : « Ce livret est des plus amusants à traiter, avec tous ces amours différents, Scozzone [contralto/mezzo-soprano] pour Benvenuto, Benvenuto pour Colombe [soprano], la Duchesse [soprano] pour Ascanio, Ascanio et Colombe […] c’est toute une étude du cœur humain », écrira Saint-Saëns en novembre 1887 alors qu’il débute la composition d’un ouvrage lyrique à la croisée du grand opéra français et de l’opéra-comique, teinté d’influences wagnériennes et italiennes.