Barcarolle op. 60
Composée durant l’été 1845 et dédiée à la baronne de Stockhausen, la Barcarolle appartient à la dernière période créatrice de Chopin et s’impose comme l’une de ses œuvres les plus complexes et les plus subtiles du point de vue de l’écriture harmonique. Tout en s’inscrivant dans le cadre d’un genre alors en vogue, la pièce n’évoque pas la tradition historique du chant des gondoliers vénitiens ni l’idiome des barcarolles d’opéra (Rossini et Auber). Elle réunit en revanche les trois composantes de l’art du compositeur : le génie de l’invention mélodique, le sens du rythme qui donne à la mélodie sa pulsation et la complexité déconcertante du langage harmonique. L’œuvre est construite comme un nocturne très développé, dont elle partage le lyrisme et la structure tripartie sans pour autant reproduire l’opposition contrastée entre les différentes sections : dans la Barcarolle, celles-ci s’enchaînent et se fondent les unes dans les autres. Après deux mesures d’introduction, le thème initial cantabile, en tierces et sixtes, émerge comme du silence, annoncé par un motif d’accompagnement en ostinato à la main gauche, qui impose un mouvement ondulant de balancement. Les variations successives que subit le thème modifient le climat émotionnel, depuis la sérénité lumineuse jusqu’à l’effusion lyrique passionnée. Dans la section médiane, en la majeur, un nouveau thème apparaît, soutenu par un contre-chant et par un accompagnement différent à la basse. Le ton est plus méditatif et introverti, en particulier dans l’admirable passage noté dolce sfogato, « cette aération, cette bouffée de brise, qui vient, interrompant le rythme, inespérément rafraîchir et parfumer le milieu de la Barcarolle ». Le sfogato amène à la reprise, mêlant premier et second thème, dans un moment d’expression passionnée, une « apothéose du sentiment » (Tomaszewski).
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data di pubblicazione : 06/09/23
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