Le Carillon

Au cours de l’année 1891, alors qu’il fait répéter le rôle de Werther à Ernest Van Dyck, Massenet reçoit du ténor le scénario d’un ballet, imaginé avec Camille de Roddaz. À Courtrai (Flandres), au XV^e siècle, l’horloger Karl aime Bertha, la fille du brasseur. Tandis qu’on annonce la visite solennelle du duc de Bourgogne, deux prétendants éconduits, Pit et Jef, sabotent l’horloge du carillon. Karl risque la prison si le carillon ne sonne pas l’entrée du prestigieux visiteur. S’affairant à réparer le mécanisme, il reçoit l’aide de saint Martin et des anges du ciel. Au matin, lorsque paraît le duc, la statue du saint patron s’illumine et l’horloge fonctionne de nouveau. Transformés en jaquemarts, Pit et Jef sonneront eux-mêmes le carillon pour les noces de Karl et Bertha. Conquis par cette légende, Massenet s’attelle à la composition durant l’été 1891 et propose naturellement son ballet au directeur de l’opéra de Vienne. La caractérisation musicale des personnages et de l’action est particulièrement soignée, et la partition fait état d’une subtile recherche de rythmes et de couleurs orchestrales. Les contrastes de masses sonores et la richesse de timbres figurent alternativement les corporations flamandes, le duo amoureux, les apparitions divines et le cortège. Dans sa correspondance avec Van Dyck, Massenet préconise une attention particulière pour les cloches : « Je vous en prie, recommandez bien les cloches pour Le Carillon. Il en faut de puissantes – le si et le mi – et les autres assez grosses. ». Le 21 février 1892, cinq jours après la création de Werther, Le Carillon est créé sur la scène du Théâtre impérial de Vienne sous la baguette de Josef Hellmesberger.