Le Chant de la cloche op. 18

Grand lecteur de Friedrich Schiller, qui lui inspira aussi sa trilogie Wallenstein, d’Indy entreprend en 1879 la composition d’une œuvre librement inspirée du poème Das Lied von der Glocke (1799). Prenant modèle sur La Damnation de Faust (ressuscitée par Jules Pasdeloup et Édouard Colonne en 1877), il en tire le livret d’une « légende dramatique » destinée au concert, mais pensée pour la scène, comme l’attestent les multiples didascalies. L’action est située dans « une ville libre du nord de la Suisse », à la charnière des XV^e et XVI^e siècles. Dans le prologue, le maître-fondeur Wilhelm, sentant sa fin prochaine, évoque les principaux moments de sa vie qui ont été marqués par les cloches. Les cinq premiers tableaux (« Le Baptême », « L’Amour », « La Fête », « Vision », « L’Incendie ») voient ceux-ci passer devant ses yeux. Le sixième tableau est celui de « La Mort », le septième celui du « Triomphe » posthume de l’artiste, dont l’œuvre ultime, une cloche monumentale, se met à sonner de manière surnaturelle. Si l’imposant effectif orchestral et choral du Chant de la cloche évoque Berlioz, l’autre grand modèle de d’Indy est ici Wagner (Les Maîtres chanteurs), dont il applique la technique du leitmotiv. La partition, qui témoigne avec éclat de ses talents d’orchestrateur, est couronnée en 1885 au concours musical de la Ville de Paris. Cette distinction sera en quelque sorte le « Prix de Rome » du jeune compositeur, qui la dédie à son maître César Franck. Le Chant de la cloche s’est imposé comme le plus grand succès dramatique de d’Indy. Très apprécié aux Pays-Bas et en Belgique, il a été porté à la scène au théâtre de la Monnaie de Bruxelles en 1912.