Hymne au soleil

Après deux échecs en 1886 et 1887, Paul Dukas retente sa chance au concours du prix de Rome en 1888. À nouveau, le concours d’essai propose l’inévitable exercice choral. Le texte est cette fois tiré d’une tragédie avec chœur de Casimir Delavigne, intitulée Le Paria et qui avait été représentée en 1821 à Paris. Delavigne passait pour être l’un des premiers imitateurs de Byron, précisément à l’époque où Berlioz se régalait lui aussi de cette littérature aux accents romantiques nouveaux. Mais les quelques vers choisis par l’Académie pour l’épreuve de 1888 sont peu de choses en matière de poésie. Très proche, dans sa facture, du chœur de 1887 (La Fête des myrtes), L’Hymne au soleil que Dukas compose alors témoigne de beaux tuttis orchestraux et de quelques séductions vocales (grands intervalles legato, soli de pupitres au complet). Les tuilages de phrases mélodiques, s’élançant alors que la ligne vocale précédente n’est pas achevée, offrent une dynamique intéressante et un souffle musical continu (sans qu’il faille y voir la moindre trace de wagnérisme). La courte incise de ténor solo – qui tient à nouveau lieu de partie centrale, comme dans Pensée des morts de 1886 – est délicatement accompagnée de la harpe et des vents. Un crescendo progressif ramène ensuite le plenum vocal et, avec lui, la « renaissance » du soleil qui paraît à son zénith tandis que s’achève la partition. Celle-ci méritait absolument d’ouvrir à Dukas les portes du second tour (et il fut effectivement admis, classé en troisième position), mais ne dépassait pas en qualité La Fête des myrtes de 1887, assurément le rendez-vous manqué entre Dukas et l’Institut. Peut-être les Académiciens furent-ils rassurés de voir, en 1888, que Dukas n’avait pas cédé – en apparence du moins – aux sirènes wagnériennes.