Jérusalem

Au moment où Verdi est sollicité pour la première fois par l’Opéra de Paris, il doit déjà terminer Macbeth et I masnadieri qui seront respectivement créés à Florence et Londres en mars et juillet 1847. Manquant de temps pour écrire une œuvre originale, il reprend I Lombardi alla prima crociata, donné à la Scala de Milan en 1843. Alphonse Royer et Gustave Vaëz traduisent et adaptent le livret de Temistocle Solera : sous leur plume, l’intrigue des quatre actes devient plus concise et vraisemblable. Le principal personnage masculin d’I Lombardi, maure succombant après avoir reçu le baptême, devient un chevalier franc menant les croisés à la victoire. Quant à Verdi, il se montre soucieux de modeler la ligne vocale sur les particularités de la langue française et de tenir compte du goût parisien. Ainsi, la marche qui ouvre l’acte II, le long ballet de l’acte III et la recherche de continuité entre les numéros prêtent allégeance au grand opéra, même si Jérusalem reste tributaire du melodramma transalpin. La dimension militaire occupe une place capitale, au détriment de l’expression religieuse de l’original italien. Pour la destitution de Gaston de Béarn, scène clef de l’acte III, Verdi compose une nouvelle musique et taille l’air « Ô mes amis » sur mesure pour Gilbert Duprez. La création de Jérusalem, le 26 novembre 1847, vaut à Verdi un beau succès et le titre de chevalier de la Légion d’honneur. En revanche, la version traduite en italien, titrée Gerusalemme, est accueillie avec tiédeur à la Scala en 1850 : le public n’apprécia guère l’affadissement de la couleur nationale… et la disparition des Lombards !