Six Fables de La Fontaine

Au début des années 1840, Jacques Offenbach commence à se faire remarquer grâce à ses danses et ses romances qui séduisent la haute société. Pour le public de cette sphère mondaine, il compose Six Fables de La Fontaine, éditées chez Cotelle en 1842. Elles auraient été chantées dès le mois de janvier de cette année, à la salle Herz. Puis, le 16 avril 1842, elles sont entendues lors du concert annuel que le compositeur organise dans les salons du facteur de piano Pleyel. Après avoir signalé leur publication en janvier, le chroniqueur du Ménestrel rapporte qu’elles « ont été vivement applaudies ». Le jeune Allemand installé à Paris depuis 1833 fait preuve d’un flair certain, car La Fontaine plaît au public. De surcroît, en brossant des saynètes pleines de fraîcheur et d’humour, il affûte sa plume avant de se lancer à l’assaut des théâtres. Dans Le Corbeau et le Renard, il interrompt avec humour, au moment de la chute du fromage, le rythme de gigue qui unifie le reste de la mélodie. La musique de La Laitière et le Pot au lait stylise discrètement quelque fredon populaire, accompagne l’exaltation de la fermière, puis se brise sur un silence de stupéfaction au moment de la catastrophe. Le Rat de ville et le Rat des champs s’achève sur le saut spectaculaire du rongeur campagnard, qui fait claquer son « adieu ! » au nez de l’ami citadin. La Cigale et la Fourmi et Le Savetier et le Financier, les deux numéros les plus théâtraux, terminent sur l’éclat d’une vocalise virtuose qui relève de la scène lyrique plus que de la romance ou de la future mélodie. En 1856, Offenbach reprendra d’ailleurs le sujet du Savetierdans une opérette bouffe portant elle aussi le titre du poème de La Fontaine.