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Musique. Psyché

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MUSIQUE
Opéra-Comique. – Psyché, opéra en quatre actes, de MM. Barbier et Carré, musique de M. Ambroise Thomas.

La partition de Psyché passe à bon droit pour une des meilleures de M. Ambroise Thomas. Elle subit aujourd’hui cette dangereuse épreuve d’être remise à la scène après vingt ans d’existence, et l’on est surpris de lui trouver tant de vie, de fraîcheur et de grâce, lorsque tant d’œuvres du même temps nous sont insupportables. L’auteur l’a bien pu rajeunir par des récitatifs qui remplacent le dialogue, à la mode nouvelle ; mais le fond de son drame est resté intact et demeure excellent.

Psyché est un opéra d’un caractère particulier, où s’accusent des intentions pittoresques originales, d’une trame musicale extrêmement curieuse et qui intéressera tous les musiciens. 

II fait comprendre à qui sait l’écouter la grande et très heureuse influence que M. Thomas a eue sur l’école actuelle. Non-seulement l’orchestration y est traitée avec une entente absolue de l’effet scénique, mais la mélodie même, dans ses plus grandes intimités, y aspire au drame visiblement. L’auteur de Psyché est le trait d’union qui relie nos compositeurs d’à-présent à Berlioz. Grâce à lui, un très grand progrès musical a été réalisé par l’école entière. Je ne crois pas qu’il ait creusé dans l’art un sillon nouveau : je crois, en revanche, qu’il a rendu le sillon moderne praticable pour tous. Par là, il s’est fait une place considérable, une place de maître et presque d’ancêtre en notre musique. C’est justice de le constater.

Psyché se rattache beaucoup plus à la tradition italienne qu’à la tradition allemande, ou plutôt, elle se rattache à la tradition française qui tient de l’une et de l’autre, mais inégalement. Chez quelques-uns de nos maîtres nationaux, le germanisme est plus fort ; chez les autres, c’est l’italianisme : il n’y a pas d’exemple de compositeur français de pure race. Dans sa jeunesse, M. Ambroise Thomas a appris à donner à ses idées des formes arrêtées et carrées, avec l’expérience, il s’est transformé en progressant. Ses rythmes se sont élargis, ses développements sont devenus plus libres ; il a senti le besoin de suivre pas à pas son texte poétique sans dérouter l’auditeur par d’inutiles digressions. Le signe de la musique moderne, c’est l’accord parfait de la mélodie et des paroles : autrement dit, la recherche de la vérité. Psyché porte partout la trace de ce souci. On y rencontre bien, de ci, de là, des points d’orgue de virtuosité, des enjolivures un peu chevronnées ; mais l’unité de l’œuvre est nettement sensible, la couleur est parfaitement appropriée au sujet, et l’équilibre très bien fait dans les tendances du compositeur.

Je ne perdrai pas mon temps et mon encre à vous raconter le livret de Psyché. Tout le monde connaît la fable antique d’Éros, amoureux d’une vierge, et la tuant de son amour. Le mythe est fort beau. J’aurais voulu des auteurs plus de simplicité naïve dans leur façon de le présenter. On ne doit toucher à la mythologie que d’une plume respectueuse. Celui-là ne chantera pas dignement Vénus qui n’y peut croire, même un instant. M. Ambroise Thomas est entré dans l’Olympe en vrai croyant, comme il faut y entrer ; ses librettistes me font assez l’effet d’y être entrés en sceptiques. Le premier a la préoccupation noble de retrouver le charme païen ; les seconds sont des Parisiens en humeur de rire et qui se prennent sur le tard à la grâce d’une fable exquise. Entre la poésie et la musique, il y a donc un certain manque d’harmonie que des suppressions heureuses dans la partie comique n’ont pu complètement dissimuler.

Le grand mérite de cette partition, c’est d’être sincère et sérieuse. Elle a jailli de la foi du compositeur autant que de sa science. Lorsqu’il a fait tourbillonner des bacchantes autour de la statue de Pan, lorsqu’il a fait pleurer des vierges autour de l’autel de Vénus, lorsqu’il a jeté Psyché entre les bras de ce terrible Éros, « effroi de Jupiter lui-même » on sent qu’il n’a pu faire autrement. II s’est improvisé païen, non pas à fleur de peau, mais jusqu’à l’âme. Ses rythmes évoquent les dryades qui dorment au cœur des arbres, les naïades qui murmurent au fond des flots, les nymphes qui mettent en joie la terre. Si la romance d’Éros : « Sommeil, ami des cieux », l’épithalame, la bacchanale, les imprécations d’Éros ne vous communiquent point le frisson mythologique, c’est assurément que vous n’êtes pas fait pour ce genre de frisson.

Parmi les morceaux les plus applaudis, quelques-uns sont vraiment délicieux : je citerai d’abord l’introduction du premier acte, le chœur des nymphes et le duo d’amour au second. Ce duo est une page magistrale, chaste à la fois et passionnée, traversée par des harmonies mystérieuses d’un goût charmant. Le ballet est aussi très brillant et habilement modulé. Je citerai ensuite l’arioso de Psyché « J’ai vainement cru dominer ma crainte » et l’invocation à la Nuit. Le finale du troisième acte m’a paru long. Puisque l’écho y joue un rôle si poignant, il eût mieux valu abréger l’extase de Psyché et arriver à l’écho tout de suite. Plus de tels effets sont bien marqués, mieux ils portent.

L’acte quatrième est d’un bout à l’autre le plus remarquable, à mon avis. C’est de beaucoup le plus soutenu et le plus poétique des quatre. On est véritablement dans le rêve le plus éthéré de l’amour. La colère d’Éros y éclate en notes vibrantes et profondes, et tout s’enveloppe d’un mystère surnaturel. Je connais peu de pages plus intéressantes que le chœur dansé : Accepte pour offrande, et plus pénétrantes que la scène finale. Elle forme à l’ouvrage une conclusion sévère et fière. Découvrons-nous devant le musicien qui a signé cela : c’est de la musique !

Le rôle de Psyché est interprété chez M. Carvalho par Mlle Heilbron, dont la voix est d’une égalité rare et qui chante à ravir. On l’a justement rappelée à la chute du rideau. Mme Engalli joue le personnage d’Éros avec cet organe superbe qu’on lui sait et cette ardeur de tempérament qui la caractérise. Quelle belle figure ferait aujourd’hui cette cantatrice sur la scène de l’Opéra, si elle pouvait se débarrasser de cet accent rauque qu’elle tient de son pays !

Les rôles d’hommes sont tenus par M. Morlet et le débutant Bacquier. La basse de M. Bacquier n’est pas sans ampleur, ni sans vigueur, mais nous ne l’avons pu juger sur le rôle peu développé du roi. M. Morlet, le Coquelin de l’Opéra-Comique, est un Mercure assez plaisant, mais qui, pour trop aimer les effets de voix sombrée, sombre, quelquefois dans les fausses intonations. Les chœurs, renforcés d’un certain nombre d’élèves du Conservatoire, ont fait honneur à M. Heyberger, leur directeur. Je glisse sur Mmes Irma-Marié et Donadio-Fodor, dont les rôles sont effacés, – ou qui les effacent. 

Au total, Psyché est un succès d’artiste pour M. Thomas, et je désire vivement que ce soit un succès d’argent pour le théâtre. L’œuvre, à la vérité, n’est pas très dramatique, mais, je l’ai dit, ce défaut vient du poème. La partition est d’un musicien éminent. Encore une fois, découvrons-nous : c’est là de la musique !

GEORGES. 

Persone correlate

Compositore

Ambroise THOMAS

(1811 - 1896)

Opere correlate

Psyché

Ambroise THOMAS

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Jules BARBIER Michel CARRÉ

Permalink

https://www.bruzanemediabase.com/it/node/12574

data di pubblicazione : 28/09/23