Courrier des théâtres. L'Ancêtre

COURRIER DES THÉÂTRES
Théâtre de Monte-Carlo ; l’Ancêtre, de M. Camille Saint-Saëns.

Ce sont toujours de belles soirées d’art que les premières lyriques données par M. Raoul Gunsbourg.

Le choix des œuvres, la beauté de l’interprétation, la magnificence de la mise en scène, tout concourt à en faire de mémorables représentations.

La nouvelle œuvre de M. Camille Saint-Saëns a remporté un glorieux succès. Le poème, de M. Augé de Lassus, développe sobrement et non sans grandeur, une histoire simple et fort dramatique de vendetta sous le Premier Empire. Cette tragédie corse, où les haines, comme les amours, sont héroïques, a produit une impression profonde.

Serrant très étroitement l’action, la musique de l’Ancêtre est d’une magnifique puissance. Il y faut admirer la pureté de ligne, le style de toute l’œuvre, d’une solide structure musicale. Les thèmes s’y posent très nets, s’y développent harmonieusement, avec l’ampleur voulue, sans longueur. C’est une belle partition de théâtre. Mais, ce qui vaut mieux, on y retrouve toutes les magistrales qualités, presque classiques, du merveilleux symphoniste qu’est M. Camille Saint-Saëns.

L’Ancêtre a triomphé pour sa vigueur dramatique et pour sa perfection musicale.

Les interprètes ont eu leur large part du succès : une distribution qui réunit Mmes Litvinne, Farrar, MM. Renaud et Rousselière – ce quatuor de grands artistes – ne pouvait manquer de soulever l’enthousiasme. Rarement œuvre fut, à la fois, aussi magnifiquement chantée et jouée avec une vie aussi intense.

Les chœurs furent parfaits, selon leur coutume. L’orchestre, sous la direction de M. Léon Jehin, s’est surpassé.

Les décors, exécutés par M. Visconti sont fort beaux et ont été justement admirés.