La Belle Hélène

Alors que le décret du 6 janvier 1864 abolit le privilège des théâtres et qu’Offenbach a récemment quitté la direction des Bouffes-Parisiens, le compositeur prévoit de renouveler la fructueuse recette d’Orphée aux enfers (1858). Il débute alors une collaboration avec le célèbre duo de librettistes Meilhac et Halévy, avec lesquels il écrira treize autres œuvres dont ses plus grands succès (La Vie parisienne, La Grande Duchesse de Gérolstein, La Périchole). À son tour, La Belle Hélène parodie un célèbre thème de l’Antiquité : l’enlèvement d’Hélène par Pâris. Les auteurs s’appliquent à remanier les faits et situations, s’amusant de nombreux anachronismes et multipliant les allusions critiques relatives à la société du Second Empire. Le comique s’appuie sur le mélange du poétique et du prosaïque dans le texte comme dans l’écriture musicale. C’est ainsi que le ton musical vient régulièrement chatouiller le ton dramatique pour créer ce décalage indispensable à l’exercice parodique. Le pastiche de styles anciens, l’incongruité de certains numéros musicaux tels que la célèbre tyrolienne, ou encore le décalage rythmique de la découpe syllabique des couplets des rois sont autant de procédés musicaux au service du comique. La partition dans son ensemble repose sur une écriture mélodique particulièrement inspirée, une orchestration brillante et une écriture vocale exigeante, notamment pour le rôle-titre gratifié des plus savoureuses acrobaties. Malgré des répétitions houleuses et de faibles budgets alloués aux décors et costumes, La Belle Hélène triomphe le soir de sa création, ouvrant l’ère de l’« Offenbachiade » durant laquelle pas un jour ne passe sans qu’un théâtre parisien ne joue le compositeur.