Chronique musicale. Lancelot

Chronique musicale.
Théâtre de l'Opéra. — Lancelot, opéra en quatre actes et six tableaux de Louis Gallet et M. Ed. Blau, musique de M. V. Joncières. [...]

Le drame lyrique de M. Joncières, que l’Opéra vient de représenter, met en scène les amours de la reine Guinèvre et du chevalier Lancelot.

[court argument de la pièce]

Sur ce livret, qui manque d’intérêt dramatique, M. Joncières a écrit une élégante partition. Malheureusement cette partition retarde de quelques années. Venue en son temps, elle nous eût paru receler non seulement les qualités que nous y trouvons aujourd’hui, mais encore une certaine audace, en regard des procédés du théâtre d’alors.

Il ne faut point oublier que M. Joncières a été à la tête des novateurs musicaux et qu’il fut un des bons combattants de la cause wagnérienne. Il y avait trois Français à la première des Maîtres Chanteurs, à Munich, et M. Joncières en était. Son œuvre est d’ailleurs d’une audition agréable. Elle manque de relief, de puissance, mais elle est écrite purement et son orchestre sonne bien. La partie la mieux réussie est la scène entre Arthus et la reine, où le compositeur a trouvé des accents émus qui ne manquent pas de grandeur ; et la péroraison touchante où Lancelot se désole devant la barque qui conduit le corps de la jeune Elaine, est animée d’un sentiment mélancolique plein de poésie.

L’œuvre a d’ailleurs trouvé un bon accueil chez le public. Malheureusement le rôle de la reine Guinèvre avait été donné à Mlle Delna, qui a été très loin de la perfection. Ce rôle ne lui convenait guère et on ne saurait s’expliquer le choix bizarre qui le lui a fait confier.

M. Vaguet a été excellent dans Lancelot, et M. Renaud, à son ordinaire tout à fait supérieur dans le rôle d’Arthus.

Mme Bosman est une Elaine gracieuse et charmante, et M. Fournets un très digne comte de Dinan. 

Robert Brussel