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Opéra-Comique. Psyché

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Opéra-Comique
Psyché, de MM. Carré et Barbier, musique de M. A. Thomas.

Une femme, mère d’un grand et beau garçon, est jalouse d’une jeune fille belle comme la Beauté. Rien de plus naturel. Elle veut perdre sa rivale et confie le soin de sa vengeance à son fils dont elle a soigné l’éducation. Voilà qui est plus extraordinaire. Celui-ci, en obéissant et docile enfant part avec les meilleures intentions du monde, mais à la vue de la splendide créature, il sent le feu de l’amour embraser son cœur et n’a plus qu’une pensée : vivre avec son amante jusque dans l’éternité. La mère, comme bien vous pensez, n’est pas absolument satisfaite de ce résultat inattendu ; mais, en bonne mère qu’elle est au fond, elle consent à oublier qu’elle est femme et pardonne à sa rivale.

Dans l’œuvre, de MM. Michel Carré et Jules Barbier, la mère, c’est Vénus, que nous n’avons pas le plaisir de voir ni d’entendre ; le fils, c’est Éros ou l’Amour pris à ses propres pièges et la belle mortelle Psyché. Celle-ci ne doit pas voir son amant ; autrement, c’est la mort pour elle qu’Éros perd à jamais. Nous voilà donc assistant, pendant quatre actes, à un petit jeu de cache-cache... le verra-t-elle, ne le verra-t-elle pas ? Il fait jour puis, tout à coup, la nuit arrive au moment où leurs embrassements voluptueux et ainsi de suite jusqu’à ce que Psyché, en vraie femme qu’elle est, vaincue par la curiosité si naturelle de son sexe, allume une lampe pendant le sommeil de son époux ; à peine a-t-elle savouré, le bonheur de le contempler qu’il disparaît et qu’elle meurt. C’est alors que la clémence de Vénus lui rend la vie et lui permet de mettre au monde le fruit, de ses amours avec Éros, la Volupté.

Ce sujet gracieux et poétique est charmant dans Apulée ; mais comment en tirer quatre actes capables de captiver à la scène. L’Amour, indispensable dans toute œuvre dramatique, figure bien dans Psyché, puisqu’il y est personnifié ; il fallait y ajouter l’intrigue, l’intérêt scénique. C’était la difficulté. Aussi, malgré leur esprit, leur imagination et leur habileté, les auteurs n’ont-ils pas pu en triompher.

Comme toujours, la musique se ressent de ce côté faible et se trouve obligée de rêvasser avec le poème qui n’a rien de précis, de défini à lui offrir et ne présente pas de situations dramatiques. M. Ambroise Thomas s’en est tiré avec la science de l’harmonie et la délicatesse de l’orchestration, au détriment de la mélodie sacrifiée. Est-ce là tout ce qu’il pouvait et devait faire ? Dans tous les cas, il l’a fait en maître.

La mélodie d’Éros au premier acte : O toi qu’on dit plus belle. — Que Venus aux yeux doux est finement traitée et amoureusement inspirée. Puis viennent, au second acte, le délicieux petit chœur des Nymphes : Quoi ! c’est Éros lui-même. — Qui soupire d’amour, exécuté par les voix jeunes et fraîches des élèves du Conservatoire ; l’air d’Éros : O Nymphes, en ces lieux — J’attends une mortelle et la piquante chanson de Mercure : Et la reine de Cythère — En secret se désespère. — D’avoir un si grand garçon ; l’aimable entrée de Psyché soulignée par les chants des nymphes groupées à la cantonade, enfin le duo d’amour : Vos yeux n’ont-ils pas vu dans le divin mensonge ? — De quelque songe qui se termine par un allégro plein de chaleur et d’élan : O feu divin ! Le dernier acte nous a paru de beaucoup supérieur au point de vue dramatique ; le souffle y est souvent puissant et nous entraîne dans le trio plein de forme et de passion chanté par Éros, Psyché et Mercure.

MlIe Heilbronn dirige en excellente musicienne une agréable voix. Nous ne pouvons, à notre grand regret, constater des progrès chez Mlle Engalli dont la voix de mezzo nous est très sympathique mais qui a bien besoin d’être travaillée et assouplie par les gammes et les vocalises. C’est souvent pénible de lui entendre filer un son. La nature l’a gratifiée d’heureuses qualités qu’elle doit compléter par un travail assidu et des études constantes.

M. Morlet avait débuté dans les Surprises de l’Amour ; il a tenu le rôle de Mercure en bon comédien et habile chanteur ; on lui a redemandé les couplets cités plus haut, qu’il a dit avec beaucoup de finesse.

La mise en scène est très soignée, ce qui n’a pas lieu de surprendre quand on connaît le goût artistique de M. Carvalho.

TIBICEN. 

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Compositeur

Ambroise THOMAS

(1811 - 1896)

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Ambroise THOMAS

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Jules BARBIER Michel CARRÉ

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date de publication : 19/10/23