Aller au contenu principal

Ariane

Catégorie(s) :
Éditeur / Journal :
Date de publication :

« ARIANE »

À la veille de la première représentation d’Ariane, qui est le grand événement de la saison musicale, nous croyons intéressant de donner à nos lecteurs une analyse succincte de l’opéra de M. Catulle Mendès et du maître Massenet.

Acte premier. — À gauche, la mer, qui ne se voit point mais se devine par une galère à l’ancre. À droite, au premier plan, dans un amoncellement de ruines, la porte de bronze du Labyrinthe ; au fond, le palais du roi Minos et les aspects imprécis d’une ville.

Thésée, roi d’Athènes (M. Muratore), est venu, avec son fidèle compagnon Pirithoüs (M. Delmas), dans l’île où règnent Minos et Pasiphaé, tuer le Minotaure, qui chaque année exige d’Athènes un tribut de jeunes vierges et de jeunes guerriers. Ariane (Mlle Bréval), dont l’amour est « instinctif, absolu, sans complications intellectuelles », lui a livré le secret du Labyrinthe, le fil qui lui permettra de se frayer, un sûr chemin parmi les dédales inextricables qui doivent le conduire auprès du monstre. Elle s’est levée au milieu de la nuit pour ouvrir au héros la porte de bronze. Bientôt sa sœur Phèdre (Mlle Grandjean) la rejoint. Phèdre, c’est « l’amour imposé par le destin, la fatalité de la passion ». Elle s’irrite, chasseresse jusqu’ici ignorante des douceurs de l’amour, des sentiments qui s’éveillent dans le cœur d’Ariane. Mais des cris retentissent : Thésée est vainqueur du Minotaure. Il apparaît, tel un jeune dieu, entouré des vierges et des éphèbes qu’il a sauvés ; chacun exalte ses vertus guerrières, mais c’est à Ariane que s’adressent ses pensées d’amour et de reconnaissance ; il l’emmènera avec lui vers Athènes, où elle sera reine, et Phèdre les suivra. Un sentiment inconnu pénètre l’âme de cette dernière ; Ariane ne saurait encore le surprendre, et Thésée, sans l’avoir devinée, n’est pourtant pas sans être étonné de l’ardeur des hommages qu’elle lui rend.

Acte deuxième : La pleine mer. La galère qui transporte les jeunes époux côtoie Delos, Paros, Melos, Andros, Syra, Lemnos, parées de fleurs et de fruits.

Ariane et Thésée, isolés dans « l’abri » de la galère, aux tentures richement décorées, s’abandonnent au charme de leurs propos amoureux. Phèdre, jalouse déjà, « songe douloureusement » à la tristesse de sa vie sans passion. Une tempête éclate, bientôt apaisée ; mais le pilote a perdu sa route et c’est vers Naxos, dont la luxuriante végétation apparaît à l’horizon, que le dirige la galère, au rythme lentement cadencé de ses rameurs.

Acte, troisième : À Naxos : « une floraison énorme et extraordinaire de rosiers géants et de lauriers-roses ». À gauche, un palais ; à droite, l’entrée d’une forêt épaisse. Au fond, sur une pelouse, un petit temple de Cypris.

Thésée semble s’abandonner aux douceurs de l’amour : c’est en vain que Pirithoüs lui rappelle ses devoirs de héros ; une invincible inquiétude s’est emparée de son cœur. Il aime ; mais ce n’est plus Ariane, dont il fuit la tendresse, c’est Phèdre qu’il désire de toute sa jeune ardeur. Ariane désolée prend sa sœur pour confidente de ses désespoirs amoureux ; elle la supplie d’intercéder auprès du héros, de tenter de le ramener à elle ; Phèdre accepte, car malgré ses coupables pensées, elle voue à sa sœur une affection sincère. Mais le sacrifice est au-dessus de ses forces. À peine en présence, Thésée et Phèdre s’avouent leur mutuel amour et Ariane surprenant leur premier baiser tombe inanimée. Le remords s’empare de Phèdre. Elle mutile la statue d’Adonis sous laquelle Cypris courroucée l’ensevelit.

Ariane dans un sublime mouvement d’abnégation supplie Cypris (Mlle Demougeot) de ranimer sa sœur ; et Cypris bienveillante ordonne aux Grâces d’accompagner l’amante héroïque au séjour des morts.

Acte quatrième. — Le Tartare. Un paysage dévasté, mélancolique et désolé. Le Styx, le Cocyte et le Phlegeton bornent l’horizon ; des formes pâles errent au loin dans d’incertaines fumées. Dans un creux de rocher, le dieu Hadès, environné de cyprès sombres, se tient immobile. Sur un trône de marbre noir, gainée en une étroite robe mauve, pâle et hiératique se tient Perséphone, un lis noir dans la main.

Perséphone (Mlle Lucy Arbell) pleure sa mélancolique destinée ; ses compagnes, tristement vêtues de deuil, la supplient de faire trêve aux tourments des damnés, mais Perséphone ne se laisse attendrir que par le souvenir de ce qui fut sa vie. Soudain des murmures harmonieux se font entendre : ce sont les Grâces qui accompagnent Ariane dans sa descente aux Enfers. Les Furies luttent quelque temps contre elles ; mais Tisiphone (Mlle Zambelli) est bientôt vaincue par Aglaïa (Mlle Sandrini). Ariane s’avance et demande à Perséphone de ranimer Phèdre ; mais Perséphone est inexorable. Pourtant Ariane tend vers elle une gerbe de roses ; alors, sous le parfum tendre des fleurs épanouies, l’âme de Perséphone s’attendrit ; malgré son timide refus, Phèdre remontera vers la vie.

Acte cinquième. — La mer, au loin, meurt sur le sable, une nef s’aperçoit ; à gauche, on devine le palais des brigands de Naxos.

La mort de Phèdre, la fuite d’Ariane, ont fait perdre à Thésée la raison ; il ignore encore celle qu’il aime le plus — Ariane qui lui fut une compagne si dévouée et qui lui montra un si héroïque dévouement ou Phèdre, dont l’amour brûlant lui est un souvenir ineffaçable. Pirithoüs l’engage, en vain, à partir. Il veut attendre encore.

Mais Ariane et Phèdre apparaissent ! Subjuguée par l’acte admirable de sa sœur, Phèdre lui rendra l’amour de son époux, et Thésée semble vouloir ne plus adorer que son épouse. Mais le devoir, qui lui semblait si simple à accomplir, échappe soudain à leurs volontés. Thésée a revu le regard de Phèdre : il est de nouveau conquis. La nef est prête, ils partiront tous deux, oublieux de celle à qui ils doivent leur bonheur.

Ariane reste seule, douloureuse, mais hautaine et fière de l’accomplissement des destinées. Sous le crépuscule qui décroît, les sirènes font entendre leurs voix captivantes et l’amante délaissée se dirige lentement vers la mer.

Personnes en lien

Compositeur, Pianiste

Jules MASSENET

(1842 - 1912)

Œuvres en lien

Ariane

Jules MASSENET

/

Catulle MENDÈS

Permalien

https://www.bruzanemediabase.com/node/18522

date de publication : 25/09/23