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Séance publique de l'Institut

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SEANCE DE L’INSTITUT. 

On a exécuté aujourd’hui 4 octobre, à l’Institut, la cantate qui a valu à M. Delhelle, élève de M. Adam, le premier prix de Rome. La belle coupole bâtie par les quarante immortels, qui meurent et se remplacent comme les plus humbles mortels d’entre nous, resplendissait de toilettes et de jolies femmes. La réunion était aussi brillante qu’animée et nombreuse. Après la lecture de l’éloge de Granet, par M. Raoul Rochette, le secrétaire perpétuel de l’Académie des Beaux-Arts, l’orchestre de l’Opéra, sous la direction de M. Battut, a exécuté une symphonie d’un ancien élève de Rome, M. Deffès, élève de M. Halévy. Il y a quelques parties fort remarquables dans cette composition instrumentale ; la forme en est pure et le fond souvent très voisin de l’originalité. Elle a obtenu les applaudissements de tout l’auditoire. La cantate de l’élève de M. Adam, j’ai hâte de le dire, est une des plus agréables, des plus franchement mélodiques que l’on ait couronnées depuis longtemps. Il est vrai de dire que le sujet était de nature à éveiller l’imagination des candidats et à leur fournir d’heureuses inspirations. Dans le concours ouvert pour la meilleure cantate, c’est celle de M. Edouard Monnais, qui a été choisie parmi beaucoup d’autres, et je ne doute pas que l’Institut n’ait fait le meilleur choix possible. M. Monnais a mis en excellents vers un chapitre des Mémoires de Sylvio Pellico, celui où l’illustre prisonnier raconte qu’ayant entendu un jour sortir d’une cellule voisine de la sienne une voix des plus suaves, son cœur fut tellement ému, qu’il voulut connaître la Madeleine inconnue gisant dans un cachot au milieu des filles de joie. Peu à peu, leurs soupirs et leurs voix se confondirent, et quand le geôlier vint annoncer à Pellico que la liberté lui était rendue, on ne parvint à l’arracher de sa prison qu’en assurant en même temps l’évasion de la jeune fille dont il était devenu amoureux. Le jeune lauréat, digne élève de l’auteur du Chalet, a traité ce sujet charmant avec plus de grâce que de profondeur. L’air que chante Boulo, de la façon la plus sympathique, débute fort bien, mais faiblit à la cabalette, qui m’a semblé un peu commune. La chansonnette de Mlle Miolan, dite avec un sentiment exquis par cette gracieuse cantatrice, est le meilleur morceau de la cantate. C’est original, plein de caractère, tout à fait vénitien. L’accompagnement, tantôt par les cors, tantôt par les violoncelles, en fait ressortir encore la touchante simplicité. – Le duo entre Boulo et Mlle Miolan, toujours dans le genre gracieux, brille par un très bon sentiment mélodique. Le trio final, où la voix de Merly se fait remarquer par la beauté de son timbre, m’a paru un peu trop long ; il est pourtant traité avec habileté, et rappelle souvent la manière aimable du maître. En somme, cette cantate accuse un vrai talent de compositeur dramatique, et je m’assure que M. Adam doit être fier d’avoir produit un tel élève. 

MARIE ESCUDIER.

Personnes en lien

Journaliste, Éditeur

Marie ESCUDIER

(1809 - 1880)

Compositeur

Louis DEFFÈS

(1819 - 1900)

Compositeur

Charles-Alfred DELEHELLE

(1812 - 1893)

Documents et archives

Permalien

https://www.bruzanemediabase.com/node/16407

date de publication : 13/09/23