Herculanum de David

Le temps nous presse et l'espace nous manque. Nous ne pouvons aujourd'hui rendre un compte détaillé du nouvel opéra en quatre actes que l'on vient de représenter au théâtre impérial de l'Opéra. Une foule considérable assistait à cette représentation. Tous les Saint-Simoniens de Paris y étaient. Ils ont applaudi comme un seul homme, et, si on n'avait mis un terme à leur enthousiasme, ils auraient fait répéter tous les morceaux de la partition. Cet enthousiasme n'a trompé personne. Il y a dans Herculanum de fort jolis passages, mai son n'y trouve rien d’élevé, de grandiose de puissamment dramatique. C'est de la musique élégante, qui ne vous émeut pas un seul moment. On y salue des réminiscences de tous les opéras connus : Robert, les Huguenots, la Juive, Guillaume Tell, Zampa, Béatrice di Tenda, Norma, les Vêpres. On ne comprend pas que Félicien David, qui a eu de si fraîches et de si poétiques inspirations dans le Désert, dans Christophe Colomb et dans la Perle du Brésil, soit resté, dans une circonstance aussi solennelle au-dessous de son brillant passé. Les trois morceaux que l'on a fait répéter sont précisément les moins saillants de la partition. On aurait pu mieux choisir. Il y a, par exemple, à la fin du second acte, une belle scène, qui a passé à peu près inaperçue, et qui méritait d'être accueillie avec chaleur.

Somme toute, l'Orphée du saint-simonisme a obtenu un succès très-honorable. Mais il serait plus vrai d'appeler Herculanum un oratorio qu'un opéra. Il y a du talent, beaucoup de talent dans cette œuvre ; on y voudrait quelque chose de plus : l'étincelle du génie.

Le ballet, réglé avec goût, n'est pas précisément un chef-d'œuvre. Mlle Emma Livry en est la reine. La jeune sylphide a obtenu, dans deux de ses pas, un succès éclatant.

La poésie d'Herculanum est de Méry, c'est dire qu'elle est splendide ; on n'est pas habitué, à l'Opéra, à des livrets écrits en un aussi beau langage.

L'exécution est superbe Mmes Lauters-Gueymard, Borghi-Mamo, MM. Roger, Obin, Coulon, Marié, ont été souvent applaudis.

Décors magnifiques et dignes de l'Opéra. Il faut louer la direction du soin et du luxe qu'elle a apportés dans la mise en scène de cette œuvre. Nous souhaitons qu'elle soit récompensée de ses nobles efforts. À dimanche prochain les détails.

Ed. Vernes.