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Théâtre de l'Opéra-Comique. L’Éclair

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THÉÂTRE DE L’OPÉRA-COMIQUE
L’Éclair, opéra-comique en trois actes, paroles de MM. de Saint-Georges et Planard, musique de M. Halévy.

La scène se passe à Boston ; voilà donc l’Opéra-Comique transporté en Amérique ! L’Opéra-Comique, ce bosquet essentiellement français, cette rose factice et nationale, les voilà bien loin de leur terre natale. Au premier abord la chose paraît étrange : des Américains qui soupirent comme des bergers de Louis XV, des Américaines qui s’amusent à chanter des duos avec une harpe éolienne ; ce n’est pas tout à fait ainsi que mistriss Trollope, M. Michel Chevalier, M. de Tocqueville, et M. de Beaumont nous ont représenté MM. Les gros marchands des États-Unis. On nous les a montrés sur les chemins de fer, sur le bateau à vapeur, dans toutes les auberges, et dans toutes les positions de la vie, et toujours calculant, supputant, comptant leur or, préparant avec le même soin la fortune ou la banqueroute. Mais par Dalayrac et par Monsigny, par M. Bouilly et par M. Marmontel, s’était-on jamais avisé de nous montrer l’Amérique roucoulant, gesticulant, faisant l’amour, se servant d’un ballot de coton comme on se sert en Espagne d’une échelle de cordes ? L’Opéra-Comique à Boston !

[Résumé de l’intrigue]

En résumé, c’est là une partition remarquable, qui prouve toute la richesse et la variété du talent de M. Halévy ; c’est là un grand succès et qu’on ne peut contester, obtenu par l’Opéra-Comique. Par ce que j’ai dit des paroles et de la musique de cet opéra, on a pu voir que le poème était une chose pleine de grâce, d’esprit et d’inventions, que la musique était pleine de goût, de conscience et de travail. Quant à l’absence totale de chœurs, qui est signalée comme une merveille, je pourrai dire : — En quoi merveille ? Qu’y a-t-il donc de louable à supprimer une partie de l’art ? Et pourquoi, s’il faut louer aujourd’hui l’absence des chœurs, ne louera-t-on pas demain le compositeur qui se passera de  grand air ou de trios ? Innovation tant que vous voudrez, mais innovation rétrograde, mais innovation malheureuse, et je doute fort que jamais Rossini l’adopte. Pour ma part, pendant tout le cours de ces trois actes, qui sont très remplis, j’ai regretté ces honnêtes chœurs qui donnent, quand on sait bien s’en servir, tant de mouvement et tant d’énergie à la musique dramatique. Félicitons donc M. Halévy de s’être passé des chœurs, surtout des chœurs de l’opéra-comique, mais gardons-nous de l’en complimenter comme s’il eût écrit le finale de Moïse.

Au reste, la pièce nouvelle qui, je le répète, est parsemée de fines et spirituelles mélodies, est montée avec soin et jouées avec goût. Collet a laissé de côté plusieurs de ses belles façons de la Belgique, et il a chanté avec un abandon qui n’a rien de nonchalant ; Mme Pradher et Mlle Camoin, sa cousine, se sont bien gardées d’avoir rien d’américain dans leur double passion et dans leur double coquetterie. À mon avis, le plus digne d’éloge dans les quatre personnages qui remplissent toute la pièce, c’est Couderc. Il est jeune, il est naïf, il est amusant, et, pour tout dire, il rappelle quelquefois Bouffé.

On a rappelé M. Halévy avec transport, et en conséquence il a été traîné sur le théâtre à quatre chanteurs.

[...]

J. J.

Personnes en lien

Journaliste

Jules JANIN

(1804 - 1874)

Compositeur

Fromental HALÉVY

(1799 - 1862)

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L’ Éclair

Fromental HALÉVY

/

Henri de SAINT-GEORGES

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date de publication : 03/11/23