Les premières représentations / La Soirée parisienne. Xavière
Les Premières Représentations
Opéra-Comique : Xavière, idylle dramatique en trois actes, poème de M. Louis Gallet, musique de M. Théodore Dubois.
Sur cette idylle plane l’âme de Mireille ; nous sentons sa présence, non seulement dans le poème, mais à plus d’un endroit dans la mélodie et l’orchestre.
La jeune Xavière, parée de toutes les grâces et de toutes les vertus rustiques, est torturée par une marâtre et par son complice le maître d’école du village, l’odieux hypocrite Landrinier. Les deux vilaines gens, qui veulent se marier ensemble, ont formé le projet d’ôter son bien à Xavière ; ils ne reculeraient même pas devant un meurtre. Ainsi Landrinier a scié l’une des hautes branches de l’arbre sur lequel la pauvrette doit monter pour la récolte des châtaignes.
Mais leur dessein criminel échoue, grâce à l’intervention de braves gens, tels que l’excellent Jacques Fulcran, le curé du village ; Prudence, sa servante ; le bon gars Galibert et Mélie, paysanne gentille à croquer. À la fin, Xavière peut épouser Landry, son compagnon d’enfance, qu’elle a toujours aimé, et s’est encore elle qui sollicite et obtient du curé Fulcran le pardon de la marâtre et du maître d’école.
Cette douce histoire est confite dans le sucre de très douces musiques. Il n’est rien à dire de la teinture harmonique de l’orchestre réduit à une fonction d’accompagnement ; mais on reconnaîtra que, pour la partie chantée, le musicien a exercé assez heureusement les mélodies et chansons populaires. Ce que je retiens de la partition, c’est le troisième acte avec une ronde et surtout une chanson à deux voix d’un joli motif, d’une couleur agréable et d’un rythme amusant.
L’innocente amusette est servie par un aimable ensemble de voix. J’y nommerai, avec une égale faveur, Mlles Dubois et Leclerc, MM. Fugère et Clément, Mlles Chevalier et Lloyd, MM. Badiali et Isnardon.
H. B.
LA SOIRÉE PARISIENNE
Romanesque et terrible, le sujet de l’idylle dramatique tirée da beau roman de Ferdinand Fabre ; les péripéties tragiques y tiennent plus de place que la psychologie, et l’on peut dire qu’il se rattache moins à l’école de Xavière de Maistre qu’à celle de Xavière de Montépin. Mais n’anticipons pas.
Quand le rideau se lève, nous apercevons la place du petit village de Camplong : à droite, l’école ; à gauche, le presbytère ; au milieu, Badiali – face brune d’imperator où brillent des dents de marbre – qui passe son bras autour de la taille de Mélie (Mlle Leclerc) ; lui passe, elle repasse, car elle est blanchisseuse. L’orchestre nous invite au sommeil en jouant le huguenotique : “Dormez, habitants de Paris” ; ce sera pour tout à l’heure.
Grand succès pour Fugère, le bon curé qui prodigue les grimaces gourmandes en reniflant une grive de vignes (Charpentier et Fasquelle, éditeurs). Il m’a beaucoup rappelé l’abbé Bridaine des Mousquetaires au couvent, une opérette dont la musique, mon Dieu ! ne diffère pas foncièrement des trouvailles de M. Théodore Dubois. On a vivement applaudi sa petite légende ornithologique de saint François prêchant l’amour de Dieu aux oiselets ; c’est de la piété proprette et menue ; l’auteur pourra faire exécuter cette aimable chose au mois de Marie de la Madeleine, puisque l’organiste est son meilleur ami.
M. Clément se fait applaudir dans une cavatine en la bémol un peu chlorotique où, parlant de sa Xavière, il constate : “Sa figure était aujourd’hui… Plus pâle encor que de coutume”. Si vous remplacez, dans ces deux vers de M. Gallet, le mot figure, par celui de musique, vous aurez mon opinion sur l’œuvre de M. Dubois.
On s’extasie devant le châtaignier du second acte, qui occupe toute la scène, découpant ses branches puissantes sur le ciel empourpré ; mais ce n’est pas sous cet arbre magnifique que l’auteur de Xavière devra s’installer pour attendre le génie ; un orme me semblerait indiqué. N’empêche que le gentil quartettino : “Ah ! que le ciel est doux !” a plu aux quelques personnes qui écoutaient, peu nombreuses, hélas ! car la plus grande partie des auditeurs s’entretenait avec animation de la mort d’Alexandre Dumas, dont on colportait la nouvelle. Dieu merci ! c’était un canard. (M. Théodore Dubois fournissait le navet.)
Vous pensez bien qu’il y a un ballet dans cette histoire-là. J’en connais de plus misérables. Filles en capette rouge, hommes en veste courte piétinent une solide bourrée ; la musique de ces danses cévenoles a de l’accent, surtout un petit coquin d’air à cinq temps, au commencement du ballet, de jolie tournure. Il aurait été rapporté de là-bas par Vincent d’Indy que je n’en serais pas autrement surprise. Il aurait été orchestré par Dubois que je n’en serais pas surprise non plus.
Au milieu des batteurs de châtaignes portant de longues gaules, Xavière gazouille… c’est l’alouette des gaules. Mais bientôt sa méchante mère la force à grimper dans le châtaignier d’où le maître d’école la fait choir. Ce qui prouve qu’on ne devrait pas faire monter les enfants à l’arbre. Le public non plus.
C’est au troisième acte que le succès s’est dessiné, indiscutable.
Il ne s’agit pas ici de mon opinion personnelle, mais je dois constater qu’on a bissé une romance sentimentale roucoulée par Mlle Leclerc dont la mièvrerie gracieuse plaît, bissé Grive, Grivette, Grivolette, un duo aux allures de gavotte, comme on avait déjà bissé, au premier acte, le motet franciscain, débité si onctueusement par l’abbé Fugère que toute la salle, debout, trépignait d’enthousiasme (Il n’y avait plus une seule personne, entendant cette légende de saint François, d’assise.) Que n’a-t-on point bissé ?
Pas une protestation après le duetto “C’est toi, c’est bien toi”, qui nous ramène aux plus beaux jours du Petit Duc, ni après les souvenirs trop précis du duo de “Magali” qu’il nous fait adMireille, ni après la phrase équivoque de Xavière candide, que tout le pays sent l’odeur du châtaignier… Foutre ! eût dit le Père Duchêne.
Il ne me reste plus qu’à mentionner les applaudissements recueillis par Mlle Chevalier, dans le rôle de La-Mère-de-la-Sûreté, et par Mlle Lloyd, énergique dans le personnage d’une femme méchante comme la peste ; Pester Lloyd, disent les Hongrois.
L’OUVREUSE DU CIRQUE D’ÉTÉ
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date de publication : 02/11/23