Première représentation. Le Roi d'Ys

PREMIÈRE REPRESENTATION
Opéra-Comique. — Le Roy d’Ys, opéra en trois actes de M. Edouard Blau, musique de M. Lalo — […].

Le livret du Roi d’Ys repose sur une légende bretonne, M. Blau a cru devoir l’utiliser pour son opéra-comique. Le roi d’Ys possède deux filles, Rozenn et Margared, de caractères différents mais dont les passions sont les mêmes puisqu’elles aiment toutes deux en secret le jeune Mylio parti pour une expédition lointaine. 

Le roi d’Ys, afin d’obtenir la paix avec une des tribus voisines de la sienne, a consenti à une union entre sa fille Margared et le roi Karnac. Margared, croyant son fiancé mort, accepte ce mariage ; main à ce moment réparait Mylio. Sa présence réveille sa passion nullement éteinte ; elle refuse Karnac, celui-ci justement outragé déclare la guerre au roi d’Ys. Mylio relève l’insulte et marche contre lui. Margared éprouve une bien grande déception lorsqu’elle s’aperçoit que ce n’est pas elle que Mylio adore mais bien sa sœur Rozenn ; la jalousie la torture cruellement et pourtant Mylio est vainqueur, Karnac erre à l’aventure le soir de la bataille au milieu des morts et des blessés. Il rencontre justement Margared, cette dernière aidera à sa vengeance, malgré l’opposition de Saint-Corentin qui les maudit. 

Margared ne craint pas de dérober les clefs des écluses et, de les remettre à Karnac au moment même de l’union de Mylio et de Rozenn, Karnac achève son œuvre de destruction et bientôt toute la ville est submergée. Tous vont, périr, lorsque Margared se repent du mal qu’elle a fait, et n’hésite pas, pour sauver les siens, à sacrifier sa vie en se précipitant dans l’abîme. La colère des dieux est apaisée et tout rentre dans l’ordre. 

Telle est succinctement l’analyse de cet opéra où M. Lalo a su obtenir le plus vif succès. La pièce débute par une ouverture très brillante et déjà fort applaudie dans les concerts, puis vient un duo entre Rozenn et Margared, fort remarqué.

Pourtant les trois premiers tableaux sont les moins bien réussis de l’ouvrage. Mais à partir du 3^e acte, le succès s’est complètement affirmé avec le chœur dialogué, chanté par les suivantes de Rozenn au moment où Mylio vient chercher sa fiancée, cette cantilène exquise et a valu un bis à tous ses interprètes.

Je citerai encore le duo entre Margared et Karnac, qui a complété ce beau triomphe. 

Les interprètes sont à la hauteur de l’Opéra, MM. Talazac, Fournets et Bouvet méritent tous des éloges ainsi que MMes Blanche Deschamps, et Simonnet. 

La pièce est bien montée, M. Paravey a prouvé une fois de plus qu’il était homme de goût. […] 

Edmond Floury.