Carmen de Bizet

OPÉRA-COMIQUE

CARMEN

Nous ne trouvons pas ce sujet d’opéra comique (très peu comique d’ailleurs) bien choisi.

Dans l’œuvre de Mérimée, d’où il est tiré, l’auteur avait pu, en donnant au type étrange de cette fille tous les développements désirables, le faire enfin comprendre et accepter.

Dans une pièce ce n’était guère possible, et Carmen nous est apparue brutale et sans aucun intérêt.

Les deux derniers actes cependant ont été assez bien accueillis et sont en effet fort dramatiques.

Sauf quelques passages gracieux, la partition de M. Bizet est complètement incolore. Cette inondation de boléros et de castagnettes manque absolument de variété.

Quant à l’interprétation, elle se ressent de cette mollesse.

M. Lhérie, le seul ténor de Paris peut-être qui ne soit pas enrhumé en ce moment (et encore !...) a lutté de son mieux contre un rôle sans relief.

M. Bouhy, en élégant toréador, nous a paru de plus en plus une réduction de Faure, qui, d’ailleurs, l’observait attentivement d’une avant-scène et semblait se regarder dans un miroir (rapetissant).

Cette imitation, qui est très-cherchée et très-voulue de la part du jeune et charmant baryton, ne nous semble pas mériter d’éloges ; elle est par trop persévérante et nous ne voyons pas ce que peut avoir à gagner un artiste à en copier aussi servilement un autre. C’est accuser un manque d’originalité très-regrettable.

Mlle Chapuy a été fort applaudie dans un charmant petit rôle.

Il nous reste à parler de Mme Galli-Marié qui a constamment et comme toujours, déployé beaucoup de talent dans cette création originale de Carmen.

Mais, selon nous, elle a souvent dépassé les bornes de la fantaisie. Si étrange et si cascadeuse que soit cette Carmen, Mme Galli ne devait pas lui donner ces allures quelquefois triviales.

Mme Galli-Marié a un peu joué ce rôle comme si l’affiche de l’Opéra-Comique eût porté :

CARMEN-ANGOT

Robert Briquet