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L’Œil crevé d’Hervé

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RENAISSANCE

Reprise de l’ŒIL CREVÉ, folie-musicale en trois actes, de M. Hervé.

C’était en 1867 se rendant bien compte que le vaudeville sentimental, appelé jusqu’alors la « folie dramatique », était passé de mode, M. Moreau-Sainti cherchait du nouveau. En vain avait-il appelé à son aide le grand Frederick lui-même, qui vint créer rue de Bondy, ce « Père Gachette », qui n’obtint qu’un succès relatif ; la foule ne venait pas ; la public voulait du nouveau, quand un beau matin, Hervé lui apporta « l’Œil Crevé » dont il avait composé et les paroles et la musique. Après avoir pris connaissance du poème, Moreau-Sainti montra simplement la porte à Hervé en le priant de porter ailleurs ses insanités. Le « compositeur toqué » tint bon, et se mit bravement au piano après le deuxième acte, le directeur était empoigné, l’Exposition allait s’ouvrir, il fallait du nouveau, il tenta l’aventure.

On sait ce qui arriva. Après une quinzaine de représentations où le public, froid comme glace, était toujours sur le point de se fâcher, encouragés par le maestro les artistes persistèrent et « l’Œil Crevé » eût trois cents représentations !...

M. Koning vient de remonter cette œuvre folie à la Renaissance. Redoutant les trop grosses invraisemblances de ce poème burlesque, il l’a fait retoucher par M. Crémieux, a fait dessiner deux cents costumes nouveaux par Draner, a triplé le nombre des chasseurs, flanqué le légendaire Géromé d’un bataillon de petits gendarmes et a servi chaud.

Un instant dérouté par ces calembredaines, le public s’est étonné et a pris le parti d’en rire franchement.

Il faut le dire : ce n’est, ni l’histoire de la petite Dindonette abandonnée dès l’âge le plus tendre dans un « carton à chapeaux », ni les amours étranges de « Fleur-de-Noblesse », faisant de la menuiserie pour plaire à celui qu’elle aime, qui l’ont charmé, c’est cette musique endiablée, irrésistible qui l’a séduit et lui a fait applaudir la pièce comme il y quinze ans.

Nous n’insisterons donc pas sur le livret dont le rajeunissement ne nous plait qu’à moitié et nous arriverons tout de suite à l’interprétation.

Jolly et Dasclauzas ont été les héros de la soirée leurs rôles ; celui du bailli et celui de la marquise ont été corsés et ont valu à ces deux fantaisistes de talent un succès des plus mérités, Alexandre, dans le rôle créé par Marcel, a fait applaudir une voix délicieuse qui va lui valoir un rôle important dans une prochaine pièce ; Mlle Jane Hading, très jolie dans celui de Fleur-de-Noblesse, a été très fêtée quoiqu’elle y manque un peu de cette gaîté excentrique indispensable au rôle ; Vautier, visiblement gêné par le souvenir de Miller, mérite le même reproche, mais sa belle voix fait merveille dans le rôle de l’épique Géromé. Mlle Mily-Meyer, plus drôle que son rôle, a été aussi très applaudie, enfin, une jeune débutante, Mlle Andrée Dalty, quoiqu’encore un peu gauche, a gentiment soupiré la romance de Dindonnette.

Bonne reprise, on somme, qui va faire encaisser de jolies recettes au théâtre de la Renaissance et remettre à la mode cette partition de « l’Œil Crevé », toujours aussi pimpante et aussi brillante qu’autrefois.

Arthur VERNEUIL 

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date de publication : 12/07/23