Cinq Aquarelles
La composition de ce cycle a été entreprise dès le retour de Lucien Durosoir à la vie civile, le 5 février 1919. Volonté d’oubli, de reconstruction de soi, d’immersion dans la musique salvatrice : la composition remplacera désormais la carrière de soliste saccagée par la guerre. Cinq délicates peintures, évocations rapides et fugaces des multiples registres de l’expression du violon et possibles clins d’œil au passé (le classicisme de « Ronde » et d’« Intermède » peut être interprété comme un hommage à Jean-Marie Leclair), ou aux maîtres contemporains (Fauré dans la « Berceuse » ?). Seule la première pièce, « Bretagne », avoue s’appuyer sur un texte poétique : un sizain de José Maria de Heredia (Les Trophées) : « Par-dessus la rumeur de la mer et des côtes / Le chant plaintif s’élève, invoquant à voix hautes / L’Étoile sainte, espoir des marins en péril / Et l’Angélus, courbant tous ces fronts noirs de hâle, / Des rochers de Roscoff à ceux de Sybiril / S’envole, tinte et meurt dans le ciel rose et pâle. » Trente ans après l’achèvement des Cinq Aquarelles, Lucien Durosoir avait eu l’occasion de les enregistrer, accompagné au piano par Henri Magne, un autre de ses plus chers compagnons de guerre. Avant de jouer « Bretagne », il avait lu les vers de Heredia et noté dans son carnet : « C’est ma voix qui restera quand je ne serai plus là, aussi mon jeu de violoniste avec ma sonorité chaude et passionnée. Grand souvenir pour les miens ». Il existe une transcription pour violoncelle et piano de Berceuse et de Ronde, réalisée par le compositeur lui-même.
Permalien
date de publication : 14/09/23
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