Hérodiade

De sujet antique et situant le fait religieux dans le décorum oriental, le conte de Flaubert est un matériau idéal à la composition d’un grand opéra. Sans exécuter sa célèbre danse des sept voiles (à l’instar de l’opéra de Strauss), Salomé y occupe une place centrale. Elle aime ardemment Jean-Baptiste et le suivra jusque dans la mort, tandis qu’Hérode, fou de jalousie, fera décapiter le prophète. L’argument pourtant concis est l’objet de nombreux remaniements alors que l’œuvre se destine simultanément à l’Opéra de Paris (en français) et la Scala de Milan (en italien). Le scénario initial de Zanardini est retravaillé par Milliet, secondé d’Hartmann, afin que le compositeur travaille sur un livret en français. Massenet veille à la cohérence dramatique de l’ouvrage dont il renforce l’unité par l’usage de motifs de rappels. La découpe claire de la partition, l’écriture musicale raffinée et brillante, les grandes scènes chorales, l’exigence vocale et dramatique des quatre rôles principaux sont autant d’ingrédients qui souscrivent au cahier des charges initial. Pourtant, si Massenet atteint là sa maturité, l’œuvre porte les séquelles d’un livret trop remanié, ayant peu à peu vidé de sa substance le rôle-titre. Ricordi se rétractant et Vaucorbeil refusant l’œuvre en l’état, Hérodiade n’est créée ni à Milan ni à Paris, mais à Bruxelles. Massenet remanie maintes fois l’ensemble, pour la création italienne du 23 février 1882 à la Scala de Milan, la création française du 29 mars 1883 à Nantes, ou la version en 4 actes du 1^er février 1884 au Théâtre-Italien de Paris, fixant tardivement une version définitive en français en 1903.