La Montagne noire
LA MONTAGNE NOIRE
Avant la première. Une œuvre nouvelle d’Augusta Holmès. Le livret et la partition.
Il y a bien quelque trente ans, qu’une femme n’a eu l’honneur de voir une de ses œuvres applaudie sur la scène de l’Opéra.
Il suffit de causer avec Mlle Augusta Holmès pour comprendre toutes les difficultés, toutes les résistances qu’une femme est obligée de vaincre pour arriver à prendre place dans l’arène artistique.
La physionomie de l’auteur de la Montagne noire est une des plus curieuses de ce temps. D’origine écossaise et irlandaise, Augusta Holmès est née à Paris. Elle possède de la Parisienne l’éclat des yeux, le sourire charmant, l’expression fière du visage sa physionomie reflète à la fois comme l’amabilité et la volonté.
Son professeur a été un maître, un vrai, César Franck, dont les nombreux portraits figurent sur les murs de l’appartement de la rue Juliette-Lamber, à côté de ceux de Wagner, du buste de Beethoven, de superbes palmes et couronnes, offertes à la vaillante artiste, et de nombreux souvenirs artistiques.
Augusta Holmès débutera vendredi au théâtre par la Montagne noire ; elle possède déjà un bagage musical considérable qui se compose d’un grand nombre de symphonies dramatiques et de poèmes symphoniques.
En 1878, elle termina Lucrèce, dont elle composa le poème et la musique, et qui fut exécuté en 1884 aux Concerts populaires d’Angers, dirigés par le compositeur Jules Bordier.
En 1880, elle obtenait le prix de la Ville de Paris avec les Argonautes (soli, chœurs, orchestre), qui furent entendus chez Pasdeloup et repris en 1881.
Le Conservatoire eut, en 1888, la primeur de Ludus pro patria, dont les récits en vers furent dits par Mounet-Sully.
Puis, tour à tour, on entendit : Irlande, pour orchestre seul, chez Pasdeloup et au concert Colonne ; Pologne, chez Pasdeloup ; Au Pays bleu (orchestre et voix), au concert Colonne.
En 1890, Mlle A. Holmès composa, pour les fêtes de Florence, l’Hymne à la Paix, sur la demande du gouvernement italien. M. Spuller, alors ministre des Affaires étrangères, envoya Mlle Holmès officieusement à Florence pour diriger les répétitions de son ouvrage au théâtre Politeamo.
L’Ode triomphale.
Toutes ces belles symphonies furent très appréciées par les musiciens, mais l’œuvre qui rendit le nom d’Augusta Holmès, vraiment populaire fut l’Ode triomphale. On se souvient de ces quatre belles représentations qui furent données au Palais de l’Industrie les 11, 13, 13 et 14 septembre 1889, sous les auspices du conseil municipal de Paris, qui avait voté 300 000 francs pour l’audition de l’œuvre.
Le théâtre avait été construit d’après les plans dessinés par Mlle Holmès elle-même. La scène ne mesurait pas moins de cinquante mètres de profondeur.
Neuf cents exécutants chanteurs, tous costumés, y prirent place à côté de trois cents musiciens d’orchestre dirigés par M. Colonne. Ces nombreux succès obtenus au concert, Mlle A. Holmès méritait bien de voir ouvrir devant elle les portes d’un de nos grands théâtres subventionnés.
Elle avait déjà dans ses tiroirs deux ouvrages lorsqu’elle écrivit la première note de la Montagne noire, un drame lyrique en deux actes intitulé Astarté et un ouvrage en un acte.
Ces deux pièces avaient été composées complètement par elle, poème et musique. Car Mlle A. Holmès, a des idées très absolues sur la collaboration. Elle ne l’admet pas et s’est promise de n’avoir jamais de collaborateur.
Elle nous disait qu’elle ne pourrait écrire une note de musique sur les vers d’autrui. La partie dramatique et la partie musicale doivent être indissolubles !
Telle est la théorie de Mlle A. Holmès. Elle n’a pas, non plus, beaucoup de tendresse pour le drame lyrique en prose ; elle reste l’amie des beaux vers et surtout des situations dramatiques.
Les récits vagues et éthérés ne lui sourient nullement.
Ce qu’elle a cherché avant tout à obtenir en écrivant la Montagne noire, c’est un drame poignant et mouvementé que la musique doit rendre le plus impressionnant possible
Le poème de la Montagne noire a été terminé en 1881 ; la musique en 1883, et l’orchestration a été achevée en 1885.
Pérégrinations.
L’ouvrage fut d’abord présenté à M. Carvalho, à la salle Favart. Le directeur de l’Opéra-Comique fut très impressionné par les beautés de la Montagne noire, mais les proportions de cette œuvre étaient vraiment trop vastes pour le cadre de la salle Favart.
Il fallait donc réduire ! Mme Holmès préféra porter son ouvrage à l’Opéra.
Elle demanda à MM. Bertrand et Colonne une audition.
Cette audition fut faite avec un soin particulier. Vingt-cinq choristes de la Société des Concerts du Conservatoire chantèrent les ensembles et les solis furent tenus de la façon suivante : Mlle A. Holmès interpréta le rôle de Pamina [sic], Mme Baldo, Dara ; Mlle Levasseur, Héléna ; M. Cougoul, Mirko ; M. Stamler, Aslar et M. Dubulle, Sava.
L’impression fut excellente. MM. Bertrand et Colonne acceptèrent immédiatement de monter l’ouvrage.
Mais un changement de direction survint ! M. Campocasso partit ; il fallut redonner devant M. Gailhard une seconde audition. Enfin, en octobre dernier, MM. Bertrand et Gailhard prévenaient Mlle Augusta Holmès que la Montagne noire allait entrer en répétitions.
L’ouvrage fut distribué : M. Alvarez, Mirko ; M. Renaud, Aslar ; M. Gresse, Sava ; Mme Bréval, Pamina ; Mme Berthet, HeIéna ; Mlle Héglon, Dara.
L’action de la Montagne noire se passe en 1657, au Monténégro, au moment de la guerre contre les Turcs.
Mlle A. Holmes nous a demandé de ne pas raconter aujourd’hui l’intrigue de son drame. Ne soyons donc pas indiscrets et disons seulement que l’intrigue roule sur une coutume du Monténégro.
Les trois premiers actes se passent dans ce pays ; le quatrième, sur la frontière de la Turquie.
Les quatre décors ont été brossés par M. Jambon ; les trois premiers, d’après des croquis dessinés par Mlle A. Holmès.
Au premier acte : Rochers sauvages avec ruines fortifiées dans la Montagne noire.
Deuxième acte : Village dans la Montagne noire.
Troisième acte : Sommet d’une montagne. Halte éclairée par la lune.
Quatrième acte : Façade de maison arabe.
Il y aura, au premier acte, un divertissement et, au dernier acte, un pas dansé par Mlle Torri.
Mlle A. Holmes est ravie de ses interprètes, enchantée de ses directeurs.
Elle nous a déclaré qu’elle n’avait qu’à se louer de tout et de tous.
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/Augusta HOLMÈS
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data di pubblicazione : 05/10/23