Académie des beaux-arts. Distribution des prix
ACADÉMIE DES BEAUX-ARTS.
DISTRIBUTION DES PRIX DE ROME. – EXÉCUTION DE LA CANTATE COURONNÉE.
C’est hier, samedi, qu’a eu lieu à l’Institut la séance annuelle du couronnement des jeunes lauréats des prix de Rome. Cette séance est la seule de l’année où la grave coupole retentisse d’autres sons que ceux de la docte parole des savants ou des maîtres en littérature, et elle appartient presque toute à la musique. Aussi la foule s’y montre-t-elle d’un empressement particulier. Hier, comme tous les ans, la salle était comble ; un grand nombre de femmes élégantes émaillaient les amphithéâtres et les tribunes, et c’est à peine si l’élément féminin n’empiétait pas quelque peu sur les bancs réservés aux membres de nos cinq Académies qui, eux aussi, ce jour là, se montrent en plus grande quantité qu’en toute autre circonstance.
La séance, présidée par M. Thomas, membre de la section de sculpture, a commencé par l’exécution à grand orchestre d’une ouverture de M. Wormser, prix de Rome de l’année 1875. Ce morceau, d’un caractère peu déterminé, est bien orchestré et a reçu bon accueil.
M. le président a pris ensuite la parole et a procédé à l’énumération des prix décernés par l’Académie des Beaux-Arts en vertu de legs et de diverses fondations libérales. Puis est venue la proclamation des prix de Rome et la remise aux lauréats de la peinture, de la sculpture, de l’architecture, de la gravure et de la musique, des diplômes et des médailles qui leur ont été décernés.
Cette partie de la séance est toujours émouvante, et c’est au milieu d’applaudissements incessants qu’on voit défiler ces jeunes gens, – peut-être des grands artistes de l’avenir – auxquels le président remet le signe de la récompense qu’ils ont méritée, puis qui, s’avançant à travers les rangs pressés des membres de l’Académie, vont recevoir l’accolade du professeur qui leur a ouvert la carrière.
Après la distribution des prix, M. le vicomte Delaborde, secrétaire perpétuel de l’Académie, a donné lecture de son intéressante notice sur la vie et les travaux du si regretté baron Taylor. La vie laborieuse, les efforts incessants, le triomphe des idées philanthropiques du fondateur des grandes associations artistiques ont été retracés en termes excellents par M. le secrétaire perpétuel, et le public a associé dans ses applaudissements le grand homme de bien que nous avons perdu et l’orateur qui parlait si éloquemment de ses talents et de ses vertus.
La séance s’est terminée par la cantate de Fingal, livret de M. Charles Darcours, partition de M. Lucien Hillemacher, élève de M. Massenet, qui a remporté le grand prix de composition musicale au concours de cette année.
Cette partition, qui ne semble point être l’œuvre d’un jeune homme de vingt ans, tant la main y est sûre, tant l’habileté s’y décèle à chaque page, a captivé pendant près d’une heure l’attention du public et a fait éclater à plusieurs reprises des applaudissements chaleureux.
Les tendances du jeune musicien le classent évidemment dans la nouvelle école ; sa déclamation passionnée et ses aspirations vers le style large le placent dès à présent au rang de nos jeunes maîtres les mieux doués.
L’interprétation de Fingal était confiée à Mlle Isaac, une vraie prima donna, à MM. Talazac et Hermann-Léon. Cette interprétation a été exceptionnelle. Nous citerons particulièrement un grand récit héroïque, que le principal interprète de Jean de Nivelle dit avec une ampleur et une magnificence d’organe qui ont provoqué une explosion de bravos de tout l’auditoire.
Pour être juste envers tous, signalons l’exécution de l’orchestre de l’Opéra qui, sous la direction de M. Altès, a apporté à l’interprétation de l’œuvre couronnée des soins et une ardeur que nous souhaitons au jeune compositeur de retrouver souvent dans sa carrière.
Ch. D.
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Fingal (Charles Darcours [Réty])
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data di pubblicazione : 16/10/23