Un opéra-comique d’après une peinture de chevalet

Notre lecteur connaît-il Phryné ? Probablement pas et les contemporains de Saint-Saëns en auraient certainement dit autant si un peintre à succès du Second Empire n’avait fait de Phryné un lieu commun. Ce peintre c’est Jean-Léon Gérôme. Sa toile s’intitule Phryné devant l’aréopage et, à l’époque, tout le monde la connaît. Le public s’était agglutiné devant elle au Salon de 1861. Il put la revoir une seconde fois lors de l’Exposition universelle de 1867 puis ce fut tout, car un collectionneur s’en était porté acquéreur pour une petite fortune. Peu importait, car à défaut de l’original, les nouvelles techniques de reproduction des oeuvres d’art avaient mis ce tableau à la portée de tous. On le retrouvait dans la presse illustrée, dans les livres ou, comme objet à part entière, sous la forme de gravure et de photographie. Goupil, le marchand de Gérôme, avait même commandé à un jeune sculpteur la version en ronde-bosse de Phryné dépouillée de ses vêtements. Cette fois, la copie valait mieux que l’original : le spectateur pouvait tourner autour et examiner Phryné sous tous les angles.