Les premières. Théâtre de l'Opéra. Roma

LES PREMIÈRES – THÉÂTRE DE L’OPÉRA
Roma, opéra-tragique en cinq actes, poème de M. Henri Cain, musique de M. Massenet.

Voilà une œuvre belle et noble qui met une fois de plus en relief les qualités de M. Massenet.

La grandeur du sujet de « Roma » permettait à M. Massenet de déployer dans la partie musicale toute la force et la majesté dont son fertile génie a trouvé des expressions d’une grande beauté.

Rome est vaincue par Carthage. Un tel événement n’a pu survenir que par suite du mécontentement des dieux. L’oracle consulté indique que la colère céleste provient de la faute amoureuse d’une vestale. Mais quelle est la coupable ? C’est la prêtresse Fausta, nièce du sénateur Fabius, qui s’est laissée séduire par Lentulus.

Afin d’échapper à ta mort, seul châtiment qui puisse calmer les dieux, Fausta s’enfuit avec Lentulus, grâce à la complicité de l’esclave gaulois Vestapos. Mais prise de remords, Fausta, comprenant la grandeur de sa faute, revient se livrer à ses juges qui la condamnent à être enterrée vivante. L’aïeule Posthumai n’a pu fléchir la rigueur des juges ; mais le jour du châtiment, elle parvient, malgré sa cécité, à se glisser auprès de Fausta et, d’un coup de poignard au cœur, la tue, abrégeant ainsi pour elle les atroces souffrances d’une lente agonie.

La mort de la prêtresse coupable calme les dieux ; le tonnerre gronde et les légions victorieuses reviennent allègrement au son d’éclatantes fanfares.

L’ouverture, d’une tenue toute classique, a été couverte d’applaudissements. Parmi les pages particulièrement goûtées, citons le duo de Fabius et du grand-prêtre, l’introduction du Bois Sacré, la rêverie de Lentulus, le duo de Lentulus et de Fausta, les imprécations de Vestapar, les supplications de Posthumia, etc.

L’interprétation est remarquable : Mlle Kousnezoff est une Fausta admirable ; sa voix claire et vibrante, son jeu simple et pathétique dénotent une artiste, au vrai sens du mot ; son succès a été très vif. Mlle Lucy Arbell est une superbe tragédienne ; Mlle Campredon a chanté d’une façon délicieuse l’aveu de la timide vestale Junia.

M. Muratore déploie dans le rôle de Lentulus toutes ses qualités vocales ; M. Delmas est plein de grandeur dans le sénateur Fabius ; MM. Noté et Journet complètent cette excellente distribution.

Jean Drault.