Opéra. Roma

Opéra : « Roma », 5 actes de M. Massenet

Voici le vingt-troisième ouvrage lyrique de notre compositeur le plus glorieux et le plus prolifique et qui ne sera pas le dernier.

Le poème musical de Roma fut tiré par M. Henri Cain de Rome vaincue, la tragédie d’Alexandre Parodi : Rome, vaincue par Annibal, ne peut espérer de se relever de sa défaite que si l’on châtie la vestale qui, abandonnant le culte de Vesta pour celui de Vénus, a déchaîné contre sa patrie la colère des dieux. Bien que cette vestale appartienne à la plus ancienne famille patricienne, sa mort seule rendra la victoire à la cité.

La recherche de la coupable, les déchirements de son aveu qui déshonore la plus noble maison Romaine, sa mort, en dépit de la douleur et des luttes de son amant, font la trame, serrée, et fort émouvante de ce beau poème. Une fois la vestale morte, la Victoire revient aux légions : et Rome est sauvée par le volontaire et fatal holocauste de la vestale parjure.

On retrouve M. Massenet tout entier dans celle partition ; moins caressant, moins séducteur peut-être, il semble surtout désireux d’exprimer par des lignes sobres et une gravité austère le caractère sévère du drame romain ; un souffle héroïsme, une intense émotion sont les qualités maîtresses de cette œuvre qui dénote chez son auteur une jeunesse toujours verte et maîtresse d’elle-même.

L'horreur du tombeau promis à Fausta et qu’exprime au cinquième acte une style dramatique de septièmes diminuées ; l’interlude du troisième acte avec sa longue phrase enguirlandée d’arpèges ; la rapsodie dramatique qui tient lieu d’ouverture, prouvent que M. Massenet, le grand musicien lyrique, est également un symphoniste de premier ordre.

Il sauf citer avec un égal éloge tous les interprétes de Roma : Mme Kousneztoff, la vestale ; Mlles Lucy Arbell, Jane Canpredon [sic] et Le Senne, ainsi que MM. Muratore et Noté, les créateurs de l’ouvrage à Monte-Carlo.

Une part de ce succès de Roma revient aux danseurs et à l’orchestre ; le parfait ensemble des voix et des instruments permet d’apprécier le travail de M. Paul Vidal qui a su les mettre en valeur. Tout cela contribue à donner une impression d’art et de beauté...

Charles Bert.