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Théâtres. Roma

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THÉÂTRES

M. Massenet met une sorte de coquetterie à montrer que son art et son style savent se plier à tous les genres de la musique dramatique. En prenant pour sujet de sa nouvelle œuvre, Roma, que l’Opéra vient de représenter, la tragédie de Parodi, Rome vaincue, adaptée par M. H. Caïn, l’auteur de Manon a voulu donner la traduction musicale d’une action dramatique coulée dans le moule traditionnel de la tragédie. Il a entrepris de traiter avec la noblesse, la sévérité et la simplicité, qui sont la loi du genre, et sans le mettre en madrigaux, un épisode de la vie rude et violente de la Rome antique.

Les Romains viennent d’être vaincus par Annibal à la Trébie, à Trasimène et à Cannes. Paul-Emile a été tué. Quelle est la cause de tant de défaites ? Un oracle révèle au grand-pontife que l’autel de Vesta a été souillé, qu’une des neuf vestales a trahi ses serments. Le châtiment de la coupable sera le sacrifice expiatoire qui apaisera la colère des dieux. Fabius et le pontife interrogent les vestales. Celle dont la faute met Rome à deux doigts de sa perte se fait connaître : c’est Fausta, la nièce et la fille adoptive de Fabius. L’homme qu’elle aime, c’est Lentulus, le tribun militaire. Fabius a l’âme assez forte et aime assez sa patrie pour consentir à ce que justice soit faite. Mais Lentulus, guidé par un esclave gaulois, a réussi à pénétrer dans le bois sacré qui entoure le temple de Vesta ; il entraîne Fausta et s’enfuit avec elle. Le Sénat va prononcer la peine terrible qui est réservée aux vestales parjures, lorsque Fausta pénètre dans la Curie. Elle vient se livrer pour le salut de la République. Les sénateurs se retirent par respect pour la douleur de Fabius. Lorsqu’ils reprennent séance, Posthumia, la grand-mère de Fausta, vient implorer leur pitié. Mais le Sénat est inexorable. Posthumia est aveugle ; son infirmité et son âge lui permettront de pénétrer auprès de Fausta au moment de l’expiation. Aussi Fabius lui glisse dans la main un poignard qu’elle donnera à Fausta. L’heure fatale est venue. C’est en vain que Posthumia cherche à dégager les mains de sa petite-fille, qui sont liées. Elle cherche sur la poitrine de Fausta la place du cœur et elle y enfonce le poignard. Cette mort plus douce suffit à apaiser les dieux ; car, à peine Fausta a-t-elle succombé que Scipion revient avec ses cohortes victorieuses.

M. Massenet a écrit sur cette donnée une partition où de grands et nobles sentiments, des passions généreuses sont exprimés avec une ampleur sereine. La déclamation est correcte et souvent puissante : tout au plus, pourrait-on trouver en certaines pages des formes mélodiques plus voisines de l’opéra de Meyerbeer que du style de Gluck. D’ailleurs, quelle que soit la souplesse de son talent, M. Massenet ne pouvait transformer son art au point de n’y plus rien laisser de la grâce légère et caressante qui lui imprime tant de charme. On retrouve sa tendresse élégante en plus d’une page de sa partition, où, d’ailleurs, elle se trouve à sa place et convient au sujet, par exemple dans le récit de la vestale innocente, et le morceau de musique descriptive qui ouvre le troisième tableau.

L’interprétation de Roma est parfaite. Mmes Kousnezoff, L. Arbell, Campredon et Le Senne, MM. Muratore, Delmas et Noté ont, dans leur chant, leur jeu, leurs attitudes, l’autorité et le charme d’artistes accomplis.

La mise en scène est une des plus belles et des plus pittoresques que l’on ait vues à l’Opéra.

M. Vidal dirige l’orchestre avec son expérience et sa sûreté habituelles.

Personnes en lien

Compositeur, Pianiste

Jules MASSENET

(1842 - 1912)

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Roma

Jules MASSENET

/

Henri CAIN

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date de publication : 24/09/23