Le Dilettante d’Avignon d’Halévy
Après avoir été annoncé pendant longtemps, le Dilettante d’Avignon a enfin obtenu hier les honneurs de la représentation. On savait que le canevas de ce nouvel ouvrage était de feu Hoffmann, et, d’avance, on s’était plu à répandre le bruit que la musique était une parodie de la musique italienne. Le désir de voir jusqu’à quel point le compositeur français avait tenu parole avait attiré assez de monde à cette première représentation. L’ouverture a d’abord on ne peut plus favorablement disposé les spectateurs ; on y a applaudi un motif charmant. Les morceaux qui l’ont suivi ont été trouvés corrects, de bon goût, quelquefois, peut-être, un peu prétentieux ; mais, pour ranimer le public, qui commençait à craindre que toute la partition ne fût empreinte de la même couleur, est arrivé un morceau, écrit de verve, d’une manière originale, vive, toute rossinienne ; il a été couvert d’applaudissements, et redemandé. Après, il faut citer un final fort gai, composé sur deux vers fameux du père Mallebranche :
Il fait en ce beau jour le plus beau temps du monde
Pour aller à cheval, sur la terre et sur l’onde.
Et dans lequel le compositeur a su adroitement intercaler l’air de Malbrough s’en va-t-en-guerre. Le succès de ce nouvel opéra, qui, bien certainement, attirera la foule à l’Opéra-Comique, a été complet ; mais ce qu’il y a de singulier, c’est qu’il a été obtenu en grande partie par des morceaux qui affectaient le plus les formes et l’allure de la musique italienne. Son exécution mérite des éloges. M. Ponchard a chanté avec un goût exquis, et a constamment animé la scène. Mme Casimir, pour laquelle avant le lever du rideau on avait sollicité l’indulgence du public, n’a pas eu besoin d’en recevoir des témoignages. Elle a été fréquemment applaudie ainsi que Mlle Monsel, qui fait des progrès sensibles comme comédienne, et promet une cantatrice distinguée. Dans le Dilettante M. Fargueil a fait le plus grand plaisir, il n’y a que deux couplets confiés à M. Boullard, qui n’aient pas été applaudis. C’est M. Ponchard qui est venu nommer les auteurs. Il a annoncé que les paroles étaient de feu Hoffmann, qu’elles avaient été arrangées par M. Léon Halévy, et que la musique était de M. Halévy frère, l’auteur de Clari. L’ombre d’Hoffmann a dû sourire au spectacle de ce triomphe de deux frères, que l’on couronnait à leur tour, protégés par le souvenir de ses nombreux succès.
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Fromental HALÉVY
/Ludovic HALÉVY
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publication date : 21/09/23