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Opéra-Comique. La Méprise

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OPÉRA-COMIQUE
Première représentation de la Méprise, opéra en un acte et en prose.

 Le nouvel opéra est une imitation de l’Étourderie de Fagan, et l’Étourderie est une des quatre ou cinq pièces auxquelles Palissot désirait que l’on réduisît le recueil beaucoup trop volumineux des comédies de cet auteur. Le dialogue en est facile et naturel ; les situations sont comiques, en admettant toutefois la première supposition, qui ne passe point les strictes limites de la vraisemblance. 

Une jeune étourdi nommé Mondor, rencontre dans une société deux personnes qu’il entend appeler, l’une madame, l’autre mademoiselle Cléonte. Il se persuade, ce que la différence des âges rend assez probable, que l’une est la mère, et l’autre la fille. Il devient amoureux, comme de raison, de la plus jeune, cherche et parvient à s’introduire dans la maison où il s’est fait précéder par une lettre adressée à Mlle Cléonte, et sur laquelle il a reçu une réponse très satisfaisante. Il se croit au comble de ses vœux ; il est loin de soupçonner l’erreur dans laquelle trop de précipitation l’a fait donner. La jeune personne est la femme de M. Cléonte, et la vieille est sa sœur. La ressemblance des noms a produit le quiproquo. Après deux scènes filées avec adresse, mais dont l’artifice est un peu trop sensible, tout s’éclaircit : Mlle Cléonte épouse un vieil assesseur, qui depuis long-temps avait des vues sur elle ; Mondor se retire tout confus de sa méprise, et se promettant bien de mieux connaître une autre fois les femmes auxquelles il adressera ses hommages. La pièce finit par un vaudeville très gai sur le danger des méprises, dans lequel il y a quelques couplets qui passeraient difficilement aujourd’hui au Théâtre Français, où il est convenu que l’on doit s’ennuyer avec décence. 

Je ne fais point de reproche à M. Creuzé de Lesser d’avoir emprunté son sujet à Fagan : il en avait fait d’avance sa confession publique avec tant d’humilité, qu’il y aurait du rigorisme à ne pas l’en absoudre. Mais ce qui le rend indigne de pardon, c’est d’avoir emprunté sans s’enrichir. Au lieu de sauver quelques invraisemblances de la pièce originale, il les a accumulées dans la sienne ; à un style toujours élégant et pur, il a substitué des lignes rimées, dont la trivialité a plus d’une fois fait rire le public ; en un mot, d’une comédie médiocre, mais agréable, il a fait un mauvais opéra. Il n’avait pas besoin, pour cela, d’avoir recours à Fagan.

La scène s’ouvre par un concert, ou plutôt par un grand air de bravoure que vient chanter Mme Duret, le cahier à la main. Le public aurait avec raison préféré une exposition claire et rapide à ce fatras de musique qui n’est placé là que pour faire briller la voix d’une actrice. Après l’ariette, le jeune Valmont déclare à un de ses frères qu’il est amoureux fou d’une cantatrice. C’est la jeune femme de M. de Bellecourt. Mais celui-ci à une sœur déjà sur le retour, une véritable Nina-Vernon, fort maniérée, fort ridicule ; le frère de l’amoureux entend que c’est elle qui est l’objet de la passion de son frère. Il se fait l’entremetteur, et n’a pas de peine à obtenir le consentement de la douairière. Tout marche, se développe et finit comme dans la pièce de Fagan, moins le vaudeville que l’on aurait pu chanter à Feydeau, et qui aurait du moins égayé cette triste représentation.

Malheureusement pour les paroles, la musique n’est pas venue à leur secours. Je n’ai trouvé de motif agréable que dans le duo : Je sais quelqu’un qui vous trouve charmante, etc. Tout le reste m’a paru vide d’idées, quoique très savant. On dit que c’est par choix que les compositeurs actuels travaillent tous sur le même patron ; on le dit, mais je ne crois pas, et eux-mêmes ne le croient pas davantage. Ils sentent intérieurement leur impuissance, et c’est dans leur désespoir qu’ils se rejettent sur la complication des moyens. S’il s’élève quelque jeune talent qui retrouve enfin la route de la nature, il y aura bientôt ramené le public avec lui ; nous avons besoin d’un Vien en musique. 

AU reste, il y a un degré d’insignifiance dont le public, quelque chose que l’on tente pour l’égarer, sait encore faire justice. Tel est l’opéra de la Méprise. Quelques voix imprudentes ont osé demander les auteurs, mais elles ont été couvertes à l’instant par d’autres voix énergiquement négatives, et l’on s’est dédommagé du temps qu’on venait de perdre, en goûtant avec délices la musique du Tableau parlant, parade assez ignoble, mais qui, par cela même, n’en est que plus propre à faire sentir le génie de Grétry, si bien secondé d’ailleurs par le jeu fin et spirituel de Mme Boulanger.

S. A. R. Mgr le duc de Berry a honoré le spectacle de sa présence ; elle a été annoncée ainsi que son départ par le bruit d’une musique guerrière, et par les acclamations unanimes des spectateurs. […]

C.

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Sophie GAIL

(1775 - 1819)

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La Méprise

Sophie GAIL

/

Auguste CREUZÉ DE LESSER

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