Semaine théâtrale. Les Chevaliers de la Table-ronde
SEMAINE THÉÂTRALE
[...]
Au bon temps de l'opérette bouffe, il eût fallu, enregistrer au nombre des grands succès du genre, la restauration des Chevaliers de la Table ronde, avec laquelle la nouvelle direction des folies-Dramatiques vient d'inaugurer son règne.
Aujourd'hui que le public semble vouloir brûler ce qu'il a tant adoré, qu'en adviendra-t-il?
Nous croyons pourtant que cette fois encore la muse folle d'Hervé pourra raviver un moment la fortune d'un genre prêt à s'éteindre.
Les Chevaliers de la Table ronde furent représentés d'abord aux Bouffes-Parisiens, il y a quelque six ans ; c'est même dans cette opérette, que le ténor Garnier effectua ses débuts, préludant ainsi aux hautes destinées qui devaient l'appeler plus tard à la direction de notre Grand-Opéra. Soyons juste, Garnier n'était pas un acteur sans originalité. Pourquoi faut-il que chez lui l'homme politique ait absorbé l'artiste ?
La vogue de cette première édition des Chevaliersne fut pas éclatante, et il n'en reste guère que la fameuse ronde : une, deux, trois, qui demeura populaire et surnagea seule dans ce naufrage.
A cette époque, maître Jacques Offenbach régnait sans partage, il était l'idole brevetée, et il ne faisait pas bon, même à Hervé, de lui emboîter le pas. On le lui fit sentir.
Aujourd'hui que ce dernier a conquis sa place au soleil de l'opérette et s'est posé fièrement en rival à côté du Dieu, on l'a écouté avec plus de bienveillance, et devant cette cour d'appel les Chevaliersont gagné leur cause. On a trouvé la musique mélodieuse et facile, souvent distinguée, écrite enfin dans une gamme qui ne dépasse pas les limites du bouffon, bien entendu. Le libretto, revu et agrémenté par MM. Chivot et Duru, a paru plaisant ; l'esprit en est facile et sans prétention. En résumé, nous le répétons, les auteurs ont obtenu gain de cause, et c'est le public qui a été condamné aux frais et dépens, c'est-à-dire qu'il apportera, durant cent représentations, son argent à la caisse de M. Cantin.
C'étaient Milher, Luce et Vavasseur, Mmes Sallard, Lasseny et Vizentini qui présentaient la défense ; d'une éloquence irrésistible, ils ont, à plusieurs reprises, enlevé les suffrages de l'auditoire. Mme Sallard a été séduisante comme Lachaud ; Mme Lasseny, fougueuse et prime-sautière comme Gambetta ; Mme Vizentini, gracieuse et ingénue comme... J'ai beau parcourir le barreau, parmi tous ces noms illustres je n'en vois pas qui puisse soutenir la comparaison.
Ne parlons que pour mémoire de tous ces gentils minois, mignons substituts qui assistaient les principaux défenseurs. Ah! La Robe était bien représentée aux Folies-Dramatiques, et jusque dans la salle, surtout aux avant-scènes de droite. [...]
H. Moreno
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Les Chevaliers de la Table ronde
HERVÉ
/Henri CHIVOT Alfred DURU
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publication date : 15/10/23