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Carmen de Bizet

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Cette pièce, est-il besoin de le dire, est tirée de la nouvelle de Prosper Mérimée, nouvelle qui semblait peu scénique, mais que MM. Meilhac et Halévy ont su traiter avec beaucoup d’habileté. Ils ont reproduit fidèlement, puisé le plus possible à la source, adopté tous les épisodes du récit de Don José, et rappelé textuellement des passages du conteur. MM. Meilhac et Halévy ont aussi conservé le personnage de Carmen sans l’atténuer, sans l’affaiblir ; ils ont laissé à cette Gitana insouciante, superstitieuse, passionnée, cruelle et dangereuse, son caractère insondable.

Rechercher les quelques modifications introduites dans l’action pour les exigences du théâtre nous paraît inutile. La pièce, conduite avec adresse, nous le répétons, ne manque pas d’intérêt, bien que le sujet soit un peu rude et le dénouement bien sombre pour une scène où le plus souvent on chante au baisser du rideau les douceurs de l’hyménée. Mais les auteurs de Carmen et le directeur de l’Opéra-Comique ont horreur des sentiers battus, du rococo.

M. Bizet appartient à cette école dont les disciples, en haine de la banalité, se méfient de leurs inspirations, et compriment leurs élans. Mais le mieux est parfois l’ennemi du bien. La musique trop travaillée ne se comprend pas tout de suite, tandis que les morceaux que l’auditeur saisit et répète bientôt sont en général éclos du premier jet. M. Bizet ne prodigue pas les mélodies promptes à être retenues, mais chez lui, la science ne nuit pas à la simplicité et à la clarté.

La nouvelle partition se recommande souvent par un grand sentiment, toujours par une grande couleur.

Nous n’avons pas sous les yeux la table thématique ; rappelons au hasard les morceaux qui nous ont le plus frappé : le chœur des Gamins, au premier acte, et celui des Femmes de la manufacture de tabac ; le duo plein de poésie de José et de Micaëla, rôle ajouté que Mlle Chapuy joue et chante d’une façon charmante ; la chanson de Carmen ; l’entr’acte qui précède le deuxième acte ; les couplets du Toréador, dits par Bouhy, de sa belle voix pénétrante, et qu’on a bissés ; la romance de Micaëla, le duo du Duel au couteau, conçu largement ; une heureuse réminiscence (?) de L’Arlésienne (on peut bien s’emprunter à soi-même) : le lever du rideau du quatrième acte, et un très beau duo entre José et Carmen.

L’orchestration est traitée avec un art consommé ; enfin, et pour nous résumer, cette partition fait grand honneur au jeune compositeur, dont le nom figure au Journal officiel dans les nominations de la Légion d’honneur.

Sans être de tous points la Carmen rêvée, Mme Galli-Marié rend très bien l’originalité de ce caractère ; elle a été très bien applaudie. Il faudrait un comédien achevé pour le personnage de Don José ; comme chanteur, Lhérie y obtient du succès.

La mise en scène est très soignée et très artistique. Les costumes ont été en partie dessinés par Detaille.

Émile Abraham

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Composer, Pianist

Georges BIZET

(1838 - 1875)

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Henri MEILHAC Ludovic HALÉVY

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