Skip to main content

Théâtres. Le Roi d'Ys

Category(ies):
Publisher / Journal:
Publication date:

THÉÂTRES
OPÉRA-COMIQUE
Le roi d’Ys, drame lyrique en trois actes par M. Edouard Blau, musique de M. Edouard Lalo.

M. Edouard Blau s’est servi pour confectionner ce livret d’une légende, qu’il a d’ailleurs beaucoup modifiée, ce qui ne l’a pas rendue plus intéressante.

La paix vient d’être conclue entre le prince Karnac et le roi d’Ys.

Celui-ci donne à son ancien ennemi, en signe de réconciliation, la main de sa fille Margared, qui ne se dévoue qu’à contre-cœur parce qu’elle aime Mylio, son ami d’enfance qui a d’ailleurs disparu à la suite d’un combat, mais dont la mort cependant n’est pas certaine.

Comme on le pense bien, Mylio reparaît au moment de la signature du contrat ; Margared retire sa parole, Karnac est furieux et la guerre recommence.

À quoi tiennent les destinées des contribuables !

Seulement, ce que n’avait pas prévu Margared, c’est que Mylio aime sa sœur Rozenn et en est aimé. 

Alors Margared, furieuse, s’associe avec Karnac qui vient d’être de nouveau vaincu et veut se venger du roi d’Ys ; et à eux deux ils ouvrent les écluses qui protègent la ville d’Ys et l’engloutissent dans la mer.

Charmantes natures ! Mylio et Rozenn se sauvent sur la pointe d’un rocher ; ils auront beaucoup d’enfants, mais leur papa n’aura plus de royaume.

Voilà le sujet ; c’est déplorable d’enfantillage, et l’on ne comprend guère qu’à notre époque des hommes sérieux s’amusent à tripoter des machines comme ça.

Quant à la partition de M. Lalo, elle contient naturellement de fort belles choses, puisqu’il est convenu que M. Lalo est un musicien très savant ; mais il nous a semblé qu’à l’instar de beaucoup de musiciens très savants, sa musique manquait assez généralement d’inspiration et de charme.

Aussi, le public lui a-t-il été reconnaissant des quelques morceaux où cette inspiration n’a pas fait défaut ; notamment la jolie mélopée de Rozenn : En silence pourquoi souffrir ? le très beau récitatif : Un jour il est venu dans le fond de nos cœurs ; l’air de Mylio : Vainement, ô ma bien-aimée !... et le charmant duo qui suit. 

Quant au reste, il est possible qu’une seconde audition révèle des splendeurs nouvelles. Nous avons entendu beaucoup de gens le prétendre. Mais nous nous défions toujours un peu de la musique à laquelle il faut s’habituer.

En art, nous aimons bien nous habituer tout de suite.

M. Talazac, pas très en voix le premier soir, a cependant chanté le rôle de Mylio avec beaucoup de succès et s’est fait redemander le joli duo du troisième acte.

Le rôle de M. Bouvet n’est pas bon, il en tire un grand parti en excellent chanteur, et en intelligent artiste qu’il est.

M. Fournetz, qui représente saint Corentin, a fait applaudir sa voix superbe dans ce bout de rôle. M. Cobalet n’a que fort peu de chose dans le personnage du roi ; il s’en tire bien. Le succès a évidemment été pour Mlle Deschamps, très dramatique dans le vilain personnage de Margared ; sa superbe voix de contralto et sa diction profonde ont produit un grand effet.

Quant à Mlle Simomiet, qui nous représente la tendre Rozenn, elle est charmante et chante ce rôle avec un véritable talent et beaucoup de grâce.

Ajoutons que cet opéra-comique est monté avec un grand soin, et que le dernier tableau, qui représente l’engloutissement de la ville d’Ys, est très saisissant.

P.-S. — La direction de l’Opéra-Comique, bien inspirée, a convié la presse à une seconde audition du Roi d’Ys ; et j’avoue que, pour mon compte, cette seconde audition a modifié mon impression première dans d’importantes proportions.

Beaucoup de parties, dont le mérite échappe au premier abord, prennent du relief ; c’est ainsi qu’un magnifique quatuor au premier acte et deux scènes vraiment admirables entre Karnac et Margared ont produit à la seconde représentation un énorme effet.

Un point sur lequel il faut insister, c’est l’éclatant succès de M. Bouvet qui, dans le rôle de Karnac, s’est montré tout à fait remarquable.
Les deux scènes dont je parlais tout à l’heure, il les a chantées et jouées en maître, avec une ampleur et une puissance vraiment étonnantes.

Il est incontestable que, de tous les interprètes de ce drame lyrique, M. Bouvet est le mieux en situation sous tous les rapports.

Related persons

Composer

Édouard LALO

(1823 - 1892)

Related works

Le Roi d’Ys

Édouard LALO

/

Édouard BLAU

Permalink