Manon Lescaut

Librement inspiré du roman de l’abbé Prévost, l’argument de Manon Lescaut conserve la trame initiale en redistribuant les différents ressorts dramatiques entre de nouveaux personnages. Manon s’y trouve une jeune ouvrière convoitée par le marquis d’Hérigny qui représente à lui seul les prétendants du roman. Acceptant l’offre du marquis, elle condamne sa liaison avec Des Grieux, renonce à une vie d’épouse et finira déportée en Louisiane. Cette figure de femme dévoyée représentée sur la scène lyrique suscite une vive polémique lors de sa création salle Favart le 23 février 1856. D’autant que l’œuvre figure parmi les premiers opéras-comiques à opter pour une fin tragique. Pourtant, la partition remporte l’adhésion immédiate du public et l’approbation unanime de la critique. Au I^er acte, la Bourbonnaise de Manon avec son accompagnement guitaristique est de belle facture. Les différents airs de baryton du marquis d’Hérigny, notamment ses couplets du II^e acte, figurent parmi les pages les plus abouties. Les divertissements du III^e acte, parmi lesquels une chanson créole, renouvellent le langage habituel du compositeur quand la scène finale culmine en un climax dramatique où les écritures vocales et orchestrales s’épousent admirablement. Si le rôle de Des Grieux demeure au second plan, celui de Manon est des plus exigeants. Sa tessiture est particulièrement haute et ses différents airs exigent la technique et la souplesse d’un soprano colorature, quand les pages d’ensemble sollicitent une couleur plus dramatique. Créé par Marie Cabel, membre des troupes de l’Opéra-Comique et du Théâtre-Lyrique, le rôle s’inscrit rapidement parmi le grand répertoire de soprano.