Le Promenoir des deux amants
L 129 (L 118). 1910
1. Auprès de cette grotte sombre – 2. Crois mon conseil, chère Climène – 3. Je tremble en voyant ton visage
Dans les Trois Chansons de France de 1904, deux mélodies sur des poèmes de Charles d’Orléans encadraient La Grotte, sur des vers de Tristan L’Hermite (ca 1600-1655) : Debussy avait mis en musique les strophes 1, 2 et 4 du Promenoir des deux amants, dont il utilisait la version révisée de 1638. Six ans plus tard, alors qu’il se concentre sur les poètes anciens et compose les Trois Ballades de François Villon, il revient à ce long poème constitué de vingt-huit quatrains en octosyllabes qui donne son titre à son nouveau groupe de trois mélodies. La première reprend intégralement La Grotte (titre remplacé maintenant par l’incipit du poème). Pour les mélodies suivantes, Debussy met en musique les quatrains 15 à 17, puis 22 à 24. Dédié à sa femme Emma, Le Promenoir des deux amants est créé le 14 janvier 1911 à la salle Érard, par Jane Bathori accompagnée par Ricardo Viñes. Ninon Vallin le chante en juin 1913, avec le compositeur au piano, émerveillé par son interprète : « Je ne sais où elle va chercher cette prenante compréhension des courbes que décrit la musique à travers le texte… mais c’est absolument beau et c’est très simple. » La musique allie en effet une fascinante économie de moyens à l’extrême sophistication de l’écriture et de l’harmonie, où les couleurs archaïsantes restent discrètes, comme absorbées dans le langage de Debussy. La ligne vocale à la tessiture resserrée murmure sa confidence sur un piano aux riches résonances, qui exploite les registres extrêmes tout en restant transparent. Debussy n’a peut-être jamais aussi bien traduit la fragilité du sentiment amoureux.