Quatre Chants
Dans l’immense tristesse – Attente – Reflets – Le retour
D’Attente (1911) à Dans l’immense tristesse (1916), on mesure l’évolution, mais aussi l’extrême précocité d’une musicienne qui, dès ses 17 ans, sut créer un univers harmonique personnel, mêlant couleurs modales, enchaînements chromatiques et touches de bitonalité. Sensible aux mystères envoûtants du symbolisme, Lili Boulanger choisit Maurice Maeterlinck pour Attente, sa première œuvre connue (si l’on excepte des essais perdus, détruits ou inachevés). En cette même année, elle revient au poète belge avec Reflets, un autre poème des Serres chaudes (elle entame par ailleurs un opéra d’après La Princesse Maleine, qu’elle laissera incomplet). Ici, l’influence de Fauré infiltre l’harmonie et l’écriture pianistique. Sur les vagues d’arpèges de l’accompagnement, la ligne vocale combine des notes répétées et de larges élans, ose quelques figuralismes comme l’intervalle ascendant sur « qui s’élève ». Pour Le Retour (1912), la jeune compositrice se tourne vers un autre poète symboliste, Georges Delaquys (ami de sa famille et gendre de Raoul Pugno), qui évoque le retour d’Ulysse à Ithaque. Il n’est peut-être pas fortuit que cette mélodie, écrite pour Hector Dufranne, créateur du rôle de Golaud dans Pelléas et Mélisande de Debussy, rappelle justement ce compositeur, en particulier la partie de piano du Faune (2e série des Fêtes galantes, 1904). Dans l’immense tristesse, sur des vers de Bertha Galeron de Calonne (poétesse aveugle et sourde), saisit par son expression tragique. L’enfant attend que sa mère disparue revienne « chanter pour l’endormir », rêve auquel le piano répond par une citation fantomatique de Dodo, l’enfant do.
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