Quatuor à cordes
Animé et très décidé – Assez vif et bien rythmé – Andantino, doucement expressif – Très modéré. Très mouvementé
Composé en 1892-1893, ce quatuor à cordes constitue la première partition instrumentale d’envergure de Debussy, la seule – avec son trio pour violon, violoncelle et piano – où il fait preuve d’une telle fidélité aux formes traditionnelles : comme s’il souhaitait prouver sa maîtrise des conventions avant de s’en émanciper de façon audacieuse. Le quatuor comprend quatre mouvements, alors que Debussy préfèrera ensuite les triptyques pour ses recueils pianistiques (Estampes, Images), ses mélodies, ses œuvres symphoniques (Nocturnes, La Mer) et ses trois sonates. Par ailleurs, l’héritage franckiste est encore nettement perceptible : mélodie dont les intervalles s’élargissent peu à peu au début du mouvement lent, présence d’un thème cyclique. Mais le compositeur de trente ans impose aussi sa singularité. Quelques mois après la création par le Quatuor Ysaÿe, le 29 décembre 1893 à la salle Pleyel, Dukas publie un article élogieux : « Tout y est clair et nettement dessiné, malgré une grande liberté de forme. [L’essence mélodique] suffit à imprégner le tissu harmonique d’une poésie pénétrante et originale. L’harmonie elle-même, malgré de grandes hardiesses, n’est jamais heurtée ni dure. M. Debussy se complaît particulièrement aux successions d’accords étoffés, aux dissonances sans crudité, plus harmonieuses en leurs complications que les consonances mêmes. » De plus, le travail sur les textures et les modes de jeu crée des sonorités inédites. On songera notamment aux pizzicatos dans le deuxième mouvement (« l’une des plus belles danses andalouses qu’on ait jamais composées » selon Manuel de Falla), dont se souviendra Ravel lorsqu’il composera son propre quatuor quelques années plus tard.