Le Tombeau de Couperin
Suite pour piano créée salle Gaveau le 11 avril 1919 (Société musicale indépendante)
Prélude – Fugue – Forlane – Rigaudon – Menuet – Toccata
Orchestration (par Ravel) créée le 28 février 1920 par les Concerts Pasdeloup :
Prélude – Forlane – Menuet – Rigaudon.
L’écriture du Tombeau de Couperin se déroule essentiellement au cours de l’année 1917, période terrible pour Maurice Ravel qui voit aux malheurs de la Première Guerre mondiale s’ajouter la perte d’une mère. Cette suite de six pièces pour piano revendique doublement une filiation baroque. D’une part, l’usage du terme « tombeau » renvoie aux pièces des XVIIe et XVIIIe siècles, conçues pour rendre hommage à un illustre disparu. D’autre part, le genre employé s’inspire des suites de danse pour clavecin. De l’aveu même du compositeur, ce tombeau s’adresse moins « à Couperin lui-même qu’à la musique française du XVIIIe siècle » et Ravel, dans un geste caractéristique du début du XXe siècle, profite de l’occasion pour s’inscrire dans l’histoire artistique de son pays tout en oblitérant la période romantique. Ces jeux de référence masquent cependant un propos plus intime et sombre. L’idée de ce tombeau vient à Ravel au lendemain de la mort au combat du musicologue Joseph de Marliave (août 1914) et l’hommage rendu par les différentes pièces ne semble pas restreint aux grandes figures du passé. Chacune des six pièces est d’ailleurs dédiée « à la mémoire » d’un proche du compositeur tombé au front. La virtuose Toccata appelle notamment à se souvenir de Marliave et c’est la femme de celui-ci, Marguerite Long, qui est désignée pour créer la suite à la Société musicale indépendante le 11 avril 1919. Face à la désolation de l’après-guerre, Ravel propose ainsi une œuvre chargée de faire le deuil des disparus en inscrivant leur mémoire dans le temps long de la patrie qu’ils ont servi.