Trio pour violon, violoncelle et piano en la majeur op. 101 no 6
Allegro non troppo – Minuetto : Allegro vivo – Andante – Allegro assai
Comme tout l’opus 101, le Trio no 6 fut dédié à Amédée Ardisson, violoniste et compositeur amateur qui organisait des séances de musique de chambre à son domicile (il reçut aussi la dédicace des Quatuors à cordes op. 21 d’Onslow). On y retrouve le style concertant caractéristique du recueil, notamment dans le finale où les échanges instrumentaux sont particulièrement serrés. Tout au long du trio, la partie de piano reste relativement claire et légère. L’Andante s’ouvre sur une introduction empreinte de gravité. Si les rythmes pointés confèrent à ce mouvement une certaine vigueur, elle est équilibrée par l’élégance des volutes mélodiques. Les ombres de l’Allegro assai se dissipent vite et voilent à peine la gaîté d’une partition qui assume son rôle de noble divertissement. Cet esprit primesautier serait-il toutefois l’arbre cachant la forêt ? En effet, le discours, riche en modulations, s’aventure souvent dans des tonalités éloignées. Le développement du premier mouvement commence en si bémol majeur, ton qui entre en tension avec le mi majeur de la fin de l’exposition. Dans le Minuetto (terme trompeur car la musique prend plutôt les allures d’un scherzo), en la majeur, la première section s’achève en sol dièse mineur ; de surcroît, la forme irrégulière brise les symétries habituelles. Les autres mouvements osent eux aussi s’écarter de la tradition, avec une réexposition commençant au ton de la dominante (Allegro non troppo), des silences inopinés créant des effets de surprise et des virages inattendus dans la réexposition (finale). En définitive, Reicha s’adresse autant au connaisseur qu’à l’amateur.