Scherzo et Nocturne
Composé en 1882, le Scherzo et Nocturne de Debussy est exécuté pour la première fois le 12 mai de la même année dans une version pour violon et piano par Maurice Thieberg et le compositeur (alors âgé de 22 ans). Le manuscrit de ce premier état de l’œuvre n’a jamais été retrouvé : seul subsiste l’arrangement pour violoncelle réalisé par Debussy au mois de juin suivant. L’association d’un scherzo et d’un autre mouvement inscrit cette page dans le sillage de la symphonie en ré mineur de César Franck (dont le deuxième mouvement est un « Scherzo-Adagio »), de Chabrier qui intitule l’une de ses Pièces pittoresques « Scherzo-valse », ainsi que du Scherzo-Intermezzo de Debussy de 1880. Dans le cadre de cette pièce pour violoncelle, toutefois, la référence à ces deux genres emblématiques du romantisme demeure mystérieuse. Si l’on peut croire, à la lecture du titre, que la partition se compose d’un scherzo puis d’un nocturne, Debussy semble proposer ici davantage une forme d’hybridation musicale, à mi-chemin entre ces deux types d’esthétique, plutôt qu’un diptyque. On ne trouve en effet trace ni du dynamisme rythmique traditionnellement associé aux scherzi romantiques ni de l’atmosphère des nocturnes de Field ou de Chopin. L’alternance entre la montée mélodieuse et legato du violoncelle et du motif chromatique détaché au rythme pointé cristallise la synthèse opérée par Debussy dans cette courte page. De forme ABA, le Scherzo et Nocturne est tout entier écrit dans une veine suspensive, au lyrisme retenu. Cette œuvre de jeunesse présente déjà quelques-unes des inflexions harmoniques chères à Debussy.