Préludes flasques (pour un chien)
Composés en juillet 1912, les quatre Préludes flasques (pour un chien) de Satie font certainement référence, avec un brin d’ironie, aux Préludes, pour piano également, de Debussy, dont le premier cahier avait paru en 1910. Par l’utilisation du terme « flasque », Satie a sans doute voulu caractériser les pièces subtiles et vaporeuses de son ami, tout autant que le contenu volontairement austère et monotone des siennes. Ornella Volta indique aussi que le « chien » est peut-être celui de la préface du Gargantua de Rabelais, capable de dépasser l’apparence repoussante de l’os pour en extraire la substantifique moelle. Il s’agit en tout cas de la première œuvre humoristique de Satie, son ascèse devant être prise au second degré, comme certains titres ou certaines indications de la partition y invitent. Décrivant la solitude du chien (et celle de Satie lui-même ?), les trois premières pièces, Voix d’intérieur, Idylle cynique et Chanson canine, font usage d’un contrepoint rudimentaire, souvent à deux voix, et de valeurs rythmiques régulières (sauf les éclats intempestifs de la Chanson canine). La quatrième pièce, Avec camaraderie, est la seule de caractère joyeux et aux textures variées. Elle marque semble-t-il le retour du canidé à la sociabilité. L’éditeur Demets refusa les Préludes flasques (pour un chien), et Satie affirma, dans une lettre à Roland-Manuel, les avoir détruits, car ils étaient « à refaire ». Leur partition fut pourtant retrouvée et publiée en 1967. En revanche, Demets accepta les trois Véritables Préludes flasques (pour un chien), que Satie, sans doute pour rattraper son échec, composa un mois plus tard.