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Séance publique de l'Institut

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Dimanche dernier nous avons rendu compte brièvement de la séance publique annuelle de l’Institut. Ajoutons aux détails que nous avons donnés, l’énumération des prix attribués à la musique. La liste en est, cette année, fort courte. Le prix Chartier, musique de chambre, a été décerné à M. Benjamin Godard (déjà lauréat de la ville de Paris, pour sa cantate symphonique : Le Tasse) ; le prix Trémont a été attribué pour moitié à M. Boisselot, l’auteur de Ne touchez pas à la Reine. Le prix Monbinne ne sera décerné que l’année prochaine, ainsi que le prix Rossini. En ce qui regarde ce dernier, M. le Président a proclamé le nom du lauréat pour la poésie, M. Paul Collin, qui a remporté la palme avec la Fille de Jaïre. Il n’est pas nécessaire, croyons-nous, de revenir sur l’ouverture de M. Véronge de la Nux, dont nous avons parlé lorsqu’elle fut exécutée dans la salle du Conservatoire, comme envoi de Rome. Quant à la cantate de M. Hue, voici ce qu’en dit le nouveau journal le Parlement, dans une note due à la plume de notre collaborateur Victor Wilder : « La cantate qui a valu à M. Hue, élève de M. Reber, le premier grand prix de composition musicale, a des mérites sérieux qui semblent nous promettre un compositeur de théâtre. J’y signale avant tout une heureuse préoccupation de l’expression dramatique et un certain respect de la prosodie, qui ne sont pas choses communes par le temps qui court. Ce qui s’y trahit le moins, c’est la personnalité du compositeur ; mais, sous ce rapport, on peut faire crédit à un jeune musicien qui fait ses premiers pas dans la carrière. On connaît le sujet de la scène lyrique de M. Grimault, mis en musique par M. Hue : c’est la vengeance de Médée, que Jason a répudiée pour épouser Créüse. L’épisode n’est pas mal choisi et s’encadre assez naturellement dans le plan tracé d’avance pour ce genre de travaux poétiques. Les vers de M. Grimault ne sont pas mal tournés non plus ; mais qu’ils sont réfractaires à la musique mesurée ! Quand donc se décidera-t-on à exiger des poètes la régularité du rythme, indispensable pour des vers destinés à se marier avec la mélodie ? M. Hue n’a point tiré mauvais parti de ce texte plus poétique que musical. Après quelques mesures de prélude, commence un long monologue de Médée traité en récitatif. Sur ce monologue se détache une agréable phrase chantée, et il se termine par une invocation aux divinités infernales, qui a de la force et de la passion. On a fait avec raison un petit succès à la marche instrumentale qui précède l’entrée de Jason et de Créüse. C’est une sorte de court épithalame symphonique, d’une note discrète et mélodieuse. Le commencement du duo suivant est également d’un très bon sentiment. Il est écrit dans la tonalité de cet amour extatique, mêlé d’un grain de mysticisme, que Gounod a chanté dans Faust et Massenet dans Ève. À partir du moment où Créüse commence à ressentir les effets du poison, le duo m’a beaucoup moins satisfait. La scène lyrique de M. Hue se couronne par un andante en trio, d’un bon effet vocal. Les sentiments qui animent les trois personnages en scène sont bien différents : Créüse exhale son amour avec son dernier soupir, Jason est partagé entre sa douleur et le désir de la vengeance, et Médée entonne ses fureurs triomphantes. Tout cela, dans la cantate couronnée, se chante un peu sur le même ton, mais c’est l’affaire des maîtres de condenser des passions si diverses dans un ensemble unique, et M. Hue n’est encore qu’un élève heureux et habile. Somme toute, pour terminer comme nous avons commencé, il y a là une promesse d’avenir.

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